de la difficulté de mesurer le coût du capital · 2021. 3. 29. · le cmpc, en prenant en compte...

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FRANCK BANCEL ESCP Europe, Labex Réfi QUENTIN LATHUILLE Morgan Stanley, Londres, Royaume-Uni ALBAN LHUISSIER Crédit Suisse, Londres, Royaume-Uni DOSSIER DOI:10.3166/RFG.242.103-118 © 2014 Lavoisier De la difficulté de mesurer le coût du capital Le coût moyen pondéré du capital (CMPC) est un des concepts clefs de la finance d’entreprise. Les auteurs identifient 1 tout d’abord les paramètres « acceptables » pour déterminer le CMPC, en prenant en compte la dimension théorique et les différentes mesures mobilisées par les praticiens. Ils montrent ensuite à partir de simulations numériques que la marge d’erreur découlant des méthodes usuelles de calcul du CMPC est importante. En conclusion, les auteurs proposent un certain nombre de solutions permettant d’améliorer les pratiques en matière de détermination du CMPC. 1. Les opinions exprimées dans cet article n’engagent que la responsabilité des auteurs. Cet article a été présenté dans différents séminaires académiques et professionnels et notamment à la Commission d’évaluation de la SFAF. Les auteurs remercient les membres de la SFAF ainsi que les rapporteurs pour leurs commentaires. Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur archives-rfg.revuesonline.com

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Page 1: De la difficulté de mesurer le coût du capital · 2021. 3. 29. · le CMPC, en prenant en compte la dimension théorique et les différentes mesures mobilisées par les praticiens

FRANCK BANCELESCP Europe, Labex Réfi

QUENTIN LATHUILLEMorgan Stanley, Londres, Royaume-Uni

ALBAN LHUISSIER Crédit Suisse, Londres, Royaume-Uni

D O S S I E R

DOI:10.3166/RFG.242.103-118 © 2014 Lavoisier

De la difficulté de mesurer le coût du capital

Le coût moyen pondéré du capital (CMPC) est un des concepts clefs de la finance d’entreprise. Les auteurs identifient1 tout d’abord les paramètres « acceptables » pour déterminer le CMPC, en prenant en compte la dimension théorique et les différentes mesures mobilisées par les praticiens. Ils montrent ensuite à partir de simulations numériques que la marge d’erreur découlant des méthodes usuelles de calcul du CMPC est importante. En conclusion, les auteurs proposent un certain nombre de solutions permettant d’améliorer les pratiques en matière de détermination du CMPC.

1. Les opinions exprimées dans cet article n’engagent que la responsabilité des auteurs. Cet article a été présenté dans différents séminaires académiques et professionnels et notamment à la Commission d’évaluation de la SFAF. Les auteurs remercient les membres de la SFAF ainsi que les rapporteurs pour leurs commentaires.

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104 Revue française de gestion – N° 242/2014

Le coût moyen pondéré du capital (CMPC) est un des concepts clefs de la finance d’entreprise. Détermi-

ner la VAN d’un projet ou la valeur d’une entreprise suppose de connaître le CMPC pour actualiser les cash-flows futurs. La récente adoption des normes IFRS et la prise en compte de la notion de « juste valeur » ont encore renforcé l’importance de ce concept qui demeure indispensable à tout exercice de valorisation. La détermination du CMPC suppose d’ap-pliquer le cadre théorique proposé par la finance d’entreprise. Les enquêtes réalisées depuis deux décennies montrent que les praticiens connaissent les modèles d’éva-luation et les mettent en œuvre (Jacobs et Shivdasani, 2012 ; Fernandez, 2012 ; Bancel et Mittoo, 2013 ; Graham et Harvey, 2001 ; Bruner et al., 1998, etc.). Ainsi, selon une enquête de l’Association for Financial Professionals (2011), 91 % des entreprises présentant un chiffre d’affaires annuel supérieur à 1 milliard de dollars actualisent les cash-flows futurs pour déter-miner la valeur d’un projet, et neuf entre-prises sur dix recourent au modèle d’éva-luation des actifs financiers (Médaf) pour calculer le coût de leur capital (cité par Jacobs et Shivdasani, 2012). Pourtant, au-delà des apparences, les enquêtes montrent également qu’il n’existe pas de consensus sur l’estimation des para-mètres nécessaires à la mise en œuvre des modèles et au calcul du CMPC. On peut penser que cette diversité des pra-tiques conduit à des différences notables en ce qui concerne l’estimation du CMPC selon les professionnels considérés. Para-

doxalement, les manuels de finance ne font que rarement état de cette absence de consensus et de la question de la mesure du CMPC. Il est en effet habituellement enseigné qu’il est possible d’estimer sans difficulté majeure le CMPC de chaque entreprise (ou pour chaque ligne de métier composant l’entreprise). Cet article part de ce constat et se concentre sur les questions suivantes : Pourquoi existe-t-il une telle diversité des pratiques ? Pourquoi n’est-il pas possible d’arriver à un consensus concernant les paramètres d’estimation du CMPC ? L’absence de consensus est-elle liée à une « mauvaise » mise en œuvre des principes théoriques ? Si l’on admet que le CMPC ne peut être parfaitement mesuré, quelles sont les conséquences sur les pratiques en finance d’entreprise ? Nous montrons dans cet article que le CMPC ne peut être défini sans assumer une marge d’erreur importante. Nous iden-tifions tout d’abord les paramètres accep-tables pour déterminer le CMPC, en prenant en compte l’aspect théorique et les dif-férentes mesures mobilisées par les pro-fessionnels. Nous utilisons notamment les résultats d’une enquête récente de l’Asso-ciation for Financial Professionals (2011) visant à évaluer les pratiques concernant la détermination du coût du capital. À partir des paramètres acceptables, nous simulons ensuite les valeurs des CMPC de trois socié-tés retenues pour leur diversité en termes d’activité et de taille (Boeing, News Corp et Wal-Mart). Enfin, nous discutons des consé-quences de nos résultats sur les pratiques en matière d’évaluation d’entreprises.

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De la difficulté de mesurer le coût du capital 105

I – LES PARAMÈTRES NÉCESSAIRES À L’ESTIMATION DU CMPC

Le CMPC se définit de la manière suivante :

CMPC = ke

Ve

Ve + Vd

+ kd

Vd

Ve + Vd

Avec : ke : coût des fonds propres,kd : coût de la dette,Ve : valeur de marché des fonds propres,Vd : valeur de marché de la dette.

Les professionnels disposent de différents degrés de liberté pour évaluer les éléments composant le CMPC que sont le coût des fonds propres, le coût de la dette et le levier financier en valeur de marché (Vd/Ve). Parmi ces trois éléments, le coût des fonds propres est sans doute le plus difficile à esti-mer car il suppose le recours à un modèle théorique. Dans la pratique, les profes-sionnels retiennent très majoritairement le Médaf qui permet de déterminer le taux de rentabilité exigé pour détenir un actif (ke) de la manière suivante :ke = Rf + be [E(Rm) – Rf]Avec : – ke est le taux de rentabilité espérée ou le coût des fonds propres.– Rf est le taux sans risque. Le taux sans risque est la rémunération associée à un investissement dans un actif sans risque

(par exemple, une obligation ou un bon du Trésor émis par un État considéré comme très peu risqué – noté AAA). – E(Rm) est l’espérance de rentabilité du portefeuille de marché qui est un actif constitué par un très grand nombre d’actions (par exemple, un indice de marché « large » comme l’Euro Stoxx 600 ou le S&P 500)2. – be est le bêta des capitaux propres (avec be = Cov (Ri, Rm) / Var (Rm). be se définit comme le coefficient de mesure du risque de l’entreprise par rapport au risque moyen du marché. Il se calcule en déterminant la covariance entre la rentabilité d’un titre (Ri) et la rentabilité du portefeuille de marché (Rm) divisée par la variance des rentabilités du portefeuille de marché. La covariance (Cov) mesure la variation simultanée de la rentabilité d’un titre (Ri) et de la renta-bilité du portefeuille de marché (Rm)3. La variance (Var) est une mesure de la disper-sion des rentabilités du marché (Rm) autour de l’espérance (E(Rm))4. – [E(Rm) – Rf] est la prime de risque de marché (différence entre l’espérance de rentabilité du marché et la rentabilité de l’actif sans risque). Dans cet article nous avons identifié et simulé les paramètres nécessaires à l’esti-mation du coût des fonds propres, de la dette et du levier financier en valeur de mar-ché (Vd/Ve). Les degrés de liberté dans la

2. L’espérance est la moyenne des rentabilités espérées pondérées par leur probabilité d’occurrence : E(r) = Σn

i = 1 ri pi

Avec : E(r) : moyenne des rentabilités espérées ; ri : rentabilité espérée dans l’état du monde i ; pi : probabilité d’occurrence de l’état du monde i.3. La covariance mesure la variation simultanée de deux variables et se définit de la manière suivante :Cov(ri,rj) = Σn

i = 1 Σmj = 1 pij (ri – E(ri)) (rj – E(rj))

4. La variance est une mesure de la dispersion des rentabilités espérées autour de l’espérance :Var = Σn

i = 1 pi (ri – E(r))2

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mesure des paramètres peuvent être décom-posés en deux catégories distinctes : 1) la première découle de la nécessité d’esti-mer une valeur numérique. Par exemple, les obligations gouvernementales des dif-férents États de diverses maturités peuvent être utilisées comme un proxy pour le taux sans risque. Ces valeurs numériques sont généralement obtenues à l’aide d’une source externe et non pas calculées par les praticiens ;

2) la deuxième est liée au choix d’une méthode donnée. Par exemple, pour éva-luer le bêta des capitaux propres (be), il est possible de régresser les rende-ments des actions contre divers indices boursiers et sur différentes périodes de temps.Les principaux degrés de liberté que nous avons estimés sont répertoriés dans le tableau 1 ci-dessous. Nous pouvons noter que cinq d’entre eux illustrent les diffé-

Tableau 1 – Paramètres nécessaires au calcul du CMPC

Valeurs numériques à estimer L’estimation du bêta

Taux sans risque (Rf) Période d’estimation

Prime de risque de marché (E(Rm)– Rf)) Indice de marché utilisé pour la régression

Coût de l’endettement (kd) Fréquence des rendements des titres

Taux d’imposition (TR)Formule utilisée pour un bêta endetté/

désendetté

Structure du capital (ratio de levier – Vd / Ve) Les ajustements effectués

MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE

Cet article vise à montrer que le CMPC n’est pas un concept parfaitement mesurable. Pour mener à bien notre démonstration, nous identifions tout d’abord les paramètres nécessaires au calcul du CMPC considérant d’une part les enseignements du cadre théorique, et d’autre part, les pratiques des professionnels. Nous utilisons notamment les résultats d’une enquête récente de l’Association for Financial Professionals (2011) menée auprès de professionnels américains de la finance. Nous mobilisons également d’autres sources académiques fré-quemment citées dans d’autres enquêtes. À partir des pratiques et des paramètres identifiés, nous simulons ensuite les valeurs des CMPC de trois sociétés retenues pour leur diversité en termes d’activité et de taille (Boeing, News Corp et Wal-Mart). En combinant l’ensemble des possibilités, nous sommes en mesure d’effectuer un total de 103 680 simulations et de repré-senter l’univers des CMPC possible pour les trois entreprises considérées. Chaque simula-tion est obtenue à partir d’hypothèses « raisonnables », fondées sur une pratique ou identifiée dans la littérature. Enfin, nous discutons en conclusion des conséquences de nos résultats en essayant d’esquisser les meilleures pratiques en matière de détermination du CMPC.

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rentes méthodes disponibles pour calculer le bêta des capitaux propres. Comme expliqué dans l’introduction, nous identifions et simulons dans cet article les paramètres nécessaires au calcul du CMPC de trois sociétés américaines (Boeing, New Corp et Wal-Mart). L’objectif est d’iden-tifier la fourchette de valeurs possibles considérant des paramètres utilisés par les professionnels.

1. L’estimation des valeurs numériques

Le taux sans risque

Le choix de l’actif sans risque est un exer-cice difficile dans la mesure où aucun actif ne présente un risque nul. En pratique, le taux sans risque est estimé à partir des rendements des titres d’État (ce qui aujourd’hui pose problème dans le contexte de surendettement des États). La question de la maturité est également essentielle. L’approche traditionnelle consiste à choisir un actif sans risque dont l’échéance est du même ordre de grandeur que la durée de vie prévue de l’investissement. Cependant, les obligations d’État à très long terme (30 ans) sont souvent peu liquides. En conséquence, la plupart des praticiens utilisent plutôt des obligations de maturités de 5 ou 10 ans. Certains professionnels préfèrent cependant

des taux à court terme, considérant que le moyen et long terme présentent un risque structurellement plus important. Évidem-ment, le choix d’un taux à court terme aura également un impact sur la détermination de la prime de risque de marché (présentée dans le paragraphe suivant). Les trois sociétés sur lesquelles portent nos simulations étant américaines, nous avons choisi d’estimer le taux sans risque à partir de titres d’État américains. Selon l’enquête de l’Association for Finan-cial Professionals (citée par Jacobs et Shivdasani, 2012), les quatre actifs les plus utilisés par les praticiens sont les bons du trésor américain à 3 mois (16 % des répon-dants), les obligations de l’État américain à 5 ans (12 %), les obligations de l’État américain à 10 ans (46 %) et les obligations de l’État américain à 30 ans (11 %). En mars 2013, les actifs sans risque américains que nous avons retenus présentaient les taux exposés dans le tableau 2.

La prime de risque de marché

La prime de risque de marché correspond à l’excédent de rendement qu’un investis-seur doit exiger pour rémunérer le risque systématique. Cette prime peut être esti-mée en mesurant l’excès de rentabilité du

Tableau 2 – Taux des actifs sans risque américains (mars 2013)

Actif Valeur

Bons du Trésor à 3 mois 0,11 %

Obligation d’État à 5 ans 0,75 %

Obligation d’État à 10 ans 1,86 %

Obligation d’État à 30 ans 3,06 %

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portefeuille de marché par rapport au taux sans risque au cours des années passées. Cela étant, sa mesure fait l’objet d’un débat concernant l’impossibilité d’observer le portefeuille de marché. En effet, même les indices de marché les plus « larges » ne comprennent pas tous les actifs (par exemple, les actifs non cotés) et sous-esti-ment les rendements négatifs associés aux entreprises ayant fait faillite (« biais du sur-vivant »). Une autre alternative pour esti-mer la prime de risque de marché consiste à calculer une prime de risque implicite. Cette dernière est obtenue à partir du taux actuariel qui égalise la valeur actuelle des flux de trésorerie futurs des actifs compo-sant le portefeuille de marché et la valeur du portefeuille de marché. Des banques ou des sociétés de conseil publient régulière-ment ces primes de risque implicites fon-dées sur des consensus d’analystes finan-ciers (tableau 3). Nous avons inclus dans nos simulations des primes de risque de marché provenant de différentes sources utilisées par les profes-sionnels : Fernandez (2012), Damodaran (2013), Ibbotson/Morningstar et Bloom-berg. Nous avons également calculé la prime historique pour le S&P500 au cours des 25 dernières années (moyenne arithmé-tique et rendement des emprunts d’État à

10 ans). Les valeurs simulées de la prime de risque de marché que nous utilisons plus loin sont corrigées pour tenir compte du taux sans risque.

Le coût de la dette

Le coût de la dette est le taux auquel une entreprise peut financer sa dette existante dans les conditions actuelles du marché. Si la dette de la société est notée par une agence de rating, le coût de la dette est relativement simple à estimer. Dans le cas contraire, il est envisageable d’obtenir une notation implicite à l’aide de sociétés com-parables ou par exemple, de considérer le coût apparent de la dette à partir des états financiers.Dans la pratique, l’enquête de l’Association for Financial Professionals (citée par Jacobs et Shivdasani, 2012) montre que 37 % des financiers utilisent le taux actuel de leur en-cours de dette, 34 % utilisent le taux pré-visionnel d’une nouvelle émission de dette et 29 % utilisent le taux moyen historique.Pour les besoins de cette étude, nous avons choisi des valeurs du coût de la dette basée sur :1) Le « spread » de crédit de la dernière émission de dette à long terme de l’entre-prise (10 ans), à laquelle nous avons ajouté le taux actuel des bons du Trésor à 10 ans ;

Tableau 3 – Estimations de la prime de risque de marché

Sondage (Fernandez) 5,50 %

Damodaran (Prime implicite) 5,78 %

Ibbotson 6,00 %

Bloomberg 8,34 %

S&P 500 – 25 ans – moyenne arithmétique 8,48 %

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2) Le taux moyen enregistré pour les émis-sions récentes (sur les 2 dernières années) de dette à long terme par les entreprises du S&P500 ayant la même notation que les sociétés que nous étudions.Les différents coûts de la dette sont présen-tés dans le tableau 4.

Le taux d’imposition

Selon l’enquête de l’Association for Finan-cial Professionals, seuls 29 % des financiers utilisent le taux d’imposition marginal des entreprises du pays dans lequel la société paie ses impôts. Ceci pourrait s’expliquer par la difficulté d’estimer ce taux sur une base consolidée pour les entreprises opé-rant dans plusieurs pays. Nous avons retenu un taux marginal de 40 % aux États-Unis en additionnant la moyenne des taux des impôts locaux au taux de 35 % d’imposi-tion fédéral sur le revenu des sociétés. Nous avons par ailleurs calculé le taux d’impo-sition effectif moyen à partir des états

financiers. Pour nos trois sociétés, le taux d’imposition peut être estimé de la manière suivante (cf. tableau 5).

La structure du capital et l’effet de levier

Déterminer le CMPC suppose de connaître la valeur de marché de la dette et des capi-taux propres. Si les capitaux propres et la dette sont cotés, les données sont facilement disponibles. Mais dans la pratique, la situa-tion est plus complexe. Par exemple, la dette et les capitaux propres peuvent être soit non cotés, soit temporairement non représenta-tifs de la structure financière de long terme de l’entreprise. Par conséquent, les prati-ciens n’hésitent pas à ajuster la structure du capital et à définir un levier cible en fonc-tion de leur expertise ou en procédant par analogie avec des sociétés comparables. Si la dette n’est pas cotée, la valeur de marché de la dette nette peut être réévaluée à partir des états financiers. Jacobs et Shivdasani (2012) expliquent que 30 % des répondants

Tableau 4 – Estimation du coût de la dette

Méthode/EstimationSociété

News Corp Wal-Mart Boeing

Taux moyen observé 3,68 % 2,65 % 2,94 %

Dernière émission à long terme 3,26 % 2,58 % 3,14 %

Tableau 5 – Estimation du taux d’imposition

Taux d’impositionSociété

News Corp Wal-Mart Boeing

Taux marginal 40,00 % 40,00 % 40,00 %

Taux effectif (moyenne des trois dernières années) 25,88 % 32,37 % 29,00 %

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calculent leur ratio d’endettement net en divisant la dette comptable par la valeur comptable des capitaux propres, 28 % uti-lisent leur dette comptable sur les capitaux propres cibles, 23 % utilisent la valeur de marché de leur dette sur leurs capitaux propres comptables et 19 % utilisent leur dette comptable actuelle sur la valeur de marché de leurs capitaux propres.Pour les besoins de cet article, nous déter-minons les structures du capital de nos trois sociétés à partir des valeurs de marché de leurs dettes financières nettes et de leurs capitaux propres en prenant en compte deux types de mesure :1) Leurs valeurs à la fin du dernier exercice fiscal terminé ;2) Leurs valeurs moyennes sur les trois der-niers exercices fiscaux.Les structures financières que nous avons retenues pour nos simulations sont présen-tées ci-après.

2. L’estimation du bêta des capitaux propres

L’estimation du bêta des capitaux propres (be) nécessite de procéder à plusieurs choix méthodologiques concernant la sélection

de l’indice du marché, la fréquence rete-nue pour les rentabilités et la technique d’ajustement. Nous présentons ci-après les différentes possibilités.

La période d’estimation

Estimer le bêta des capitaux propres néces-site de disposer des rentabilités historiques d’une action et d’un indice de marché. Une longue période d’estimation conduit à des valeurs plus précises du bêta (car il y a plus de données dans la régression). Néanmoins, des données récentes constituent souvent une meilleure indication de la situation actuelle de l’entreprise. Dans la pratique, l’horizon temporel utilisé varie largement selon les praticiens. Selon l’enquête de l’As-sociation for Financial Professionals (2011), 41 % des répondants retiennent une période d’estimation de 5 ans. Nous avons consi-déré dans nos simulations des périodes d’estimation de 2, 5, 10 ans.

La fréquence

L’utilisation de rendements mensuels per-met de diminuer l’importance d’évènements exceptionnels en moyennant les retours sur une période importante, mais conduit

Tableau 6 – Estimation du levier financier

Structure du capital5Société

News Corp Wal-Mart Boeing

Dette nette moyenne sur capitalisation boursière moyenne 8,76 % 14,63 % 5,62 %

Dette nette fin 2012 sur capitalisation boursière fin 2012 9,13 % 15,54 % 0,12 %

Dette nette fin 2012 sur capitalisation boursière moyenne 10,99 % 16,60 % 0,13 %

Dette nette moyenne sur capitalisation boursière fin 2012 7,24 % 13,67 % 5,27 %

5. Le calcul correspond à la valeur pour Dette nette

Dette nette + Capitaux propres

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à une diminution substantielle du nombre de points utilisés pour effectuer la régres-sion. L’utilisation de rendements quotidiens conduit à des points très dispersés, avec des évènements exceptionnels impactant forte-ment non seulement la corrélation mais aussi le bêta, du fait des problèmes de robustesse de la méthode des moindres carrés (cf. enca-dré « Bêtas et R2 »). Les rendements hebdo-madaires peuvent être considérés comme un compromis, même si l’expérience montre par exemple que ce choix (jour de début de la semaine – qui devrait théoriquement avoir un impact nul en moyenne) impacte signi-ficativement les résultats. Les trois options de calcul (rendements mensuels, hebdoma-daires et quotidiens) ont été considérées dans nos simulations car il n’est pas possible de conclure sur la supériorité d’une approche par rapport à l’autre.

Le portefeuille de marché

Le choix du portefeuille de marché est également fondamental. Comme il n’existe pas en tant que tel, la plupart des praticiens choisissent d’utiliser un indice de marché relativement large afin d’être aussi proche que possible du cadre théorique. Dans nos simulations, nous avons retenu deux indices différents : le S&P500 (indice domestique pour les entreprises considérées) et l’indice mondial MSCI (indice large composé d’en-treprises issues de très nombreux pays).

Les ajustements

Pour l’instabilité dans le temps

Une fois sa valeur brute estimée, le bêta peut également être ajusté pour tenir compte de l’instabilité dans le temps. Blume (1975) montre en effet que lorsqu’un secteur (ou une entreprise) arrive à maturité, son bêta

a tendance à converger vers celui du mar-ché. Selon l’enquête de l’Association for Financial Professionals (2011), 57 % des répondants utilisent un bêta ajusté.

Pour l’effet de levier financier

Dans un monde sans impôt et sans dette risquée (Modigliani et Miller, 1958), le bêta ajusté de l’effet de levier financier (bu, ou bêta désendetté) peut être obtenu par la

formule suivante : bu = be

1 + VdVe

. Dans un

univers avec impôts, la déductibilité des frais financiers modifie les conditions du calcul du bêta désendetté qui devient égal

à : (bu = be

(1 + (1 – T)VdVe

)). Cette approche

développée par Hamada (1969 et 1972) met en lumière le fait que le bêta des capi-taux propres dépend du levier financier et du risque de l’activité économique. La valeur de l’entreprise est égale à la valeur de l’entreprise désendettée plus la valeur des économies fiscales liées à la présence d’impôt (sachant que plusieurs approches sont disponibles pour actualiser les écono-mies d’impôt futures).En tenant compte de toutes les combi-naisons possibles, nous avons obtenu 324 valeurs de bêta pour chaque entreprise. Nous présentons dans la page suivante des hypothèses et des valeurs représentatives des bêtas pour nos trois sociétés (tableau 7).

II – LES SIMULATIONS DE CMPC

Dans la première partie, nous avons iden-tifié les hypothèses acceptables par les praticiens pour estimer les paramètres qui conditionnent le calcul du CMPC. Le

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De la difficulté de mesurer le coût du capital 113

tableau 8 résume les différentes possibilités que nous avons prises en considération pour nos simulations. Comme le montre ce tableau, les hypo - thèses décrites dans la première partie nous conduisent à effectuer un total de 103 680 simulations pour le calcul du CMPC de Boeing, New Corp et Wal-Mart. Chaque simulation est obtenue à partir d’hypo-thèses fondées sur une pratique identifiée dans la littérature ou dans les enquêtes menées auprès des professionnels. Les figures 1, 2 et 3 présentent les valeurs du CMPC que nous avons obtenues et montrent comment leur répartition se com-pare à une courbe gaussienne.

Comme nous pouvons le voir, les dis-tributions statistiques obtenues ont une forme gaussienne. Plus important encore, elles sont très largement réparties. Comme le montre le tableau 9, les valeurs mini-males simulées des CMPC de News Corp, Wal-Mart et Boeing, ressortent à 4,46 % ; 2,16 % et 5,07 %. Les valeurs maximales sont respectivement égales à 14, 14 % ; 7,24 % et 12,07 %. Nous pensons cependant que nos simula-tions font apparaître des valeurs pour le CMPC des trois entreprises qui sont au-delà des fourchettes de valeurs « acceptables ». Certaines valeurs issues de nos simulations seraient en effet considérées par les prati-

BÊTAS ET R²

Les praticiens utilisent souvent le coefficient de corrélation (R²) obtenu à partir de la régres-sion linéaire comme une mesure de la qualité de l’estimation du bêta. Cependant, le R² peut être faible, non pas parce que le Médaf est un mauvais modèle mais pour des raisons qui tiennent à la méthode des moindres carrés et/ou à l’utilisation de données inappropriées. Ainsi :a) Le principe de la méthode des moindres carrés est de minimiser la somme des carrés des « distances » des points à la droite de régression. L’utilisation de carrés permet de travail-ler avec des grandeurs toujours positives et surtout, de rendre le problème d’optimisation extrêmement simple sur un plan analytique. Cela étant, cette méthode donne une grande importance aux points aberrants (« outliers »). Conceptuellement, un point aberrant, par exemple éloigné de la droite de 5 unités, aura un poids dans le calcul égal à celui de 25 points « normaux » éloignés de la droite d’une seule unité. Ainsi, un très petit nombre de points aberrants peut conduire à un R² très faible ou déformer la droite de régression, bien que le modèle soit, hormis ces quelques points aberrants, très satisfaisant. Notons qu’il est possible de renforcer la robustesse des moindres carrés en excluant les points aberrants, ou d’utiliser d’autres fonctions que la fonction carré.b) Un faible R² peut également résulter du choix de données inapproprié. Par exemple, le choix d’un indice de marché, d’une période d’estimation ou de fréquences des rendements inadaptés peut conduire à un faible R². L’interprétation d’un R² faible nécessite donc de s’assurer que la régression a été conduite avec des données adéquates avant de pouvoir conclure sur l’importance du risque spécifique.

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114 Revue française de gestion – N° 242/2014

ciens comme trop « extrêmes » et ne pour-raient être validées. Il est probable que les professionnels établissent une fourchette de valeurs pour le CMPC en fonction d’une représentation préexistant au calcul et/ou

à partir de conventions de place. Ainsi, un expert en évaluation considèrera la partie supérieure des fourchettes de valeurs pos-sibles pour la prime de risque de marché mais dans le même temps retiendra des

Tableau 8 – Les paramètres utilisés dans notre simulation

Paramètre Possibilités #

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Calcul de bêta

Horizon temporel 10 ans 5 ans 2 ans 3

Fréquence des rendements

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Indice de marché S&P500MSCI

World Index2

Ajustement pour le levier financier

AucunSans impôts

(4 ratios D/E)

Avec impôts (4 ratios

D/E)9

Ajustement pour l’instabilité temporelle

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Nombre de combinaisons potentielles 103 680

Note : DN : dette nette, CB : capitalisation boursière, D/E : dette/fonds propres.

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De la difficulté de mesurer le coût du capital 115

Figure 1 – Simulations du CMPC de New corp

Figure 2 – Simulations du CMPC de Walmart

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116 Revue française de gestion – N° 242/2014

valeurs plus faibles pour les autres para-mètres afin de « moyenner » son calcul. Notons également que l’estimation du CMPC de trois grandes entreprises comme Boeing, New Corp et Wal-Mart est sans doute un exercice relativement facile à réa-liser du fait de leur cotation et de la dispo-nibilité des informations. En revanche, dans

un grand nombre de transactions de fusion-acquisition, la valorisation de l’entreprise nécessite de définir un CMPC pour chaque domaine d’activité dans lequel l’entreprise opère en sachant que cette dernière n’est pas cotée. Dans ce cas, les praticiens utilisent un ensemble de firmes cotées comparables dans le but d’extraire des données permet-

Figure 3 – Simulations du CMPC de Boeing

Tableau 9 – Propriétés statistiques clés des distributions obtenues pour le CMPC

News Corp Wal-Mart Boeing

Moyenne 9,08 % 4,51 % 8,10 %

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De la difficulté de mesurer le coût du capital 117

tant d’estimer les paramètres du CMPC. Cette approche est source de difficultés supplémentaires liées au manque d’homo-généité des entreprises comparables.

CONCLUSION

Cinquante ans après son introduction, le CMPC est un des concepts les plus utilisés en finance d’entreprise. Cependant, malgré un cadre théorique rigoureux, il n’y a pas de consensus sur les méthodes d’estimation des paramètres nécessaires à son calcul. La détermination du CMPC nécessite donc de mobiliser un nombre important d’hy-pothèses (concernant la prime de risque de marché, le bêta, le ratio de l’effet de levier, et le taux sans risque). Comme nous l’avons montré en recourant à des simulations, l’ensemble des CMPC pos-sibles est très étendu et la subjectivité du calcul est incontestable. Dans la pratique, le CMPC est au moins autant le résultat d’une « convention » que le produit d’un simple calcul. Nous souhaitons en conclu-sion de cet article tirer plusieurs enseigne-ments de ce qui précède. 1) Il est essentiel de concevoir le CMPC comme un concept non parfaitement mesu-rable. Les fourchettes de valeur retenues pour le CMPC renvoient à la détermination « d’hypothèses raisonnables ». On ne peut calculer le CMPC mais simplement estimer des fourchettes de valeurs dans lesquelles il est situé. Retenir une valeur unique pour le CMPC conduit à une estimation erronée de la valeur qui ne peut être pleinement intégrée que par des simulations et des tests de sensibilité (ce que font par ailleurs de nombreux professionnels de la finance). 2) L’enseignement du CMPC devrait davan-tage mettre l’accent sur la grande difficulté

d’estimation des paramètres. Il est impor-tant de présenter les sources disponibles et la nécessité de les appréhender dans une cohérence d’ensemble. La recherche en finance et en sciences de gestion pourrait également contribuer au débat en se réap-propriant un concept qui n’est plus un objet de recherche majeur depuis les années 1970. Une recherche « appliquée » qui permet-trait de fonder les meilleures pratiques en matière d’estimation des paramètres serait en effet d’une grande utilité pour la com-munauté financière mais également au-delà.3) Certaines pratiques professionnelles sont plus contestables que d’autres. Si le passage de la théorie à la pratique est complexe, il n’en reste pas moins qu’il est possible de définir un ensemble de « meilleures » pratiques pour définir le CMPC. Ainsi, les paramètres doivent être sélectionnés en cohérence avec l’actif devant être éva-lué. Par exemple, le bêta d’une entreprise multinationale sera estimé avec un indice de marché mondial. La prime de risque de marché retenue sera homogène au taux sans risque et cohérente avec les caracté-ristiques de l’actif (prime de risque euro-péenne pour une entreprise européenne, etc.), etc. Des simulations seront réalisées à partir de paramètres cohérents. Un scéna-rio « central » et une fourchette de CMPC « acceptables » seront établies et les valeurs extrêmes (ou peu probables) seront éli-minées. Bien entendu, si ces propositions ne règlent pas tous les problèmes, elles favorisent les approches les plus vertueuses en « réalignant » les pratiques et le cadre théorique. Cela nous semble être la condi-tion nécessaire pour mieux appréhender le CMPC et en améliorer l’usage dans le monde professionnel.

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118 Revue française de gestion – N° 242/2014

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