actes de st jean par prochore
TRANSCRIPT
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7/30/2019 Actes de St Jean par Prochore
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Actes de St Jean l'Evangliste
par
Prochore
Traduction franaise et texte grec
mis en ligne
par
Albocicade
2013
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Prambule
L'ouvrage, mis sous le nom de Prochore ne parat pas remonter au
del du iv sicle de l're chrtienne. Tandis que les Latins n'en
ont fait aucun cas, les Grecs au contraire lui ont accord qelque
autorit, et Simon Mtaphraste l'a pris pour base de sa vie de StJean.
Il est par ailleurs fait mention de Prochore, comme disciple de St
Jean et son successeur Ephse, dans une vie de St Jean en arabe.
Seules les notes les plus essentielles ont t conserves. Elles sont
rassembles en fin de document.
La traduction franaise ayant t ralise antrieurement
l'dition critique du texte grec par Zahn, sur un texte indtermin,
il ne faut pas chercher une concordance absolue entre nos deux
documents.
Toutefois, dans la mesure o ma connaissance il n'existe
pas d'autre traduction franaise dans le domaine public, il
convient de la considrer comme une premire approche.
Sources :
Traduction et notes : Dictionnaire des Apocryphes, Tome 2, dit
par Migne, 1858, col 759 816
Texte grec : Acta Johannis, unter Benutzung von C. v.
Tischendorf's Nachlass, bearbeitet von Theodor Zahn, 1880
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CHAPITRE PREMIER
Il arriva qu'aprs l'assomption dans le ciel de Notre-Seigneur
Jsus-Christ, Fils du Dieu vivant les disciples s'tant rassembls
Gethsman, Pierre leur dit : "Vous savez, mes frres, commentNotre-Seigneur nous a laiss l'ordre d'aller dans le monde entier
prcher l'Evangile toutes les cratures et les baptiser au nom du
Pre et du Fils et du Saint-Esprit, et comme nous ne dsirons rien
de plus que d'accomplir promptement ce qui nous a t
recommand par le Seigneur, il convient, mes trs chers frres,
que, par la grce de la Trinit, nous nous appliquions l'uvre
que le Seigneur nous a prescrite, car il a dit : "Je vous enverraitous comme des brebis au milieu des loups ; soyez prudents
comme des serpents et simples comme des colombes". (Matth.
X). Vous n'ignorez pas, mes frres, que le serpent, lorsque
quelqu'un veut le tuer, abandonne tout son corps, mais cache sa
tte ; de mme, mes frres, exposons-nous la mort et ne
renonons pas Jsus-Christ qui est notre chef ; de mme les
colombes ne s'affligent pas lorsqu'on les prive de leurs petits et nesavent pas renoncer leur matre. Vous savez que Notre-Seigneur
et Matre nous a dit : "Puisqu'ils m'ont perscut, ils vous
perscuteront. C'est pourquoi, mes frres, il vous reste traverser
beaucoup de tribulations, mais des biens sont rservs ceux qui
souffrent des tribulations cause du saint nom du Seigneur".
Jacques, le frre du Seigneur, rpondit Pierre et dit : "Tu as bien
parl, Pierre, car le temps est venu o l'ordre du Seigneur doit
s'accomplir ; vous savez cependant, mes frres, que le Seigneur
m'a enjoint de rester Jrusalem". Et Pierre rpondit et dit :
"Nous savons tous que c'est le lieu confi tes soins et que tu ne
dois pas t'loigner de Jrusalem".
Les aptres tirrent donc au sort (1), et il attribua l'Asie Jean qui
gmit beaucoup et qui se jeta aux pieds des frres en versant des
larmes. Et Pierre, le prenant de la main droite, le releva et lui dit :
"Nous avons tous pour toi la plus grande vnration ; nousregardons ta patience comme un exemple et un encouragement
pour nous tous ; que fais-tu donc, mon frre, et pourquoi troubles-
tu nos curs ?" Et Jean rpondant Pierre dit : "Pardonne-moi,
mon pre, de ce que j'ai t extrmement troubl au moment o
j'ai vu que l'Asie m'tait assigne par le sort ; j'ai t effray des
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prils qui pouvaient m'attendre sur mer, et je ne me suis pas
souvenu de la parole du Seigneur qui m'aimait et qui a dit : "Il ne
tombera aucun des cheveux de votre tte". Excusez-moi, mes
frres et priez pour moi, afin que le Seigneur me pardonne aussi.
Je suis prt aller partout o m'appellera sa volont et son bonplaisir".
Et tous les aptres se levant se tournrent vers l'orient, priant
Jacques, le frre du Seigneur, de prononcer la prire laquelle ils
se joignirent tous. Les aptres se dirigrent ensuite chacun vers le
pays qui lui tait dsign, et chacun fut accompagn de l'un des
soixante-douze disciples. Moi, Prochore, je fus signal par le sort
comme devant exercer le ministre avec l'aptre Jean. Et nousdescendmes de Jrusalem Jopp o nous restmes trois jours
dans la maison d'une veuve du pays de Tabite. Et un navire tant
venu d'Egypte et devant continuer son voyage vers l'Asie, nous
nous y embarqumes. Lorsque nous fmes dans le fond du navire,
Jean fut saisi d'une grande tristesse, et il dit : "Mon fils Prochore,
nous serons en butte beaucoup de tribulations et beaucoup de
prils sur mer, et il ne m'a rien t rvl par le Seigneur au sujetde ma vie ou de ma mort, mais vous serez dlivrs des prils de la
mort, et nul d'entre vous ne prira. Lorsque tu seras chapp, mon
fils, aux dangers de la navigation, va en Asie, entre Ephse et
attends-y pendant trois mois mon arrive ; si Dieu permet que
j'arrive pendant ce temps, nous aurons nous acquitter des
fonctions du ministre qui nous a t confi ; si les trois mois
s'coulent sans que je revienne, retourne, mon fils, Jrusalem,
auprs de Jacques, et fais ce qu'il commandera".
Aprs que Jean, mon matre, m'eut ainsi parl, vers la onzime
heure, il s'leva une tempte qui brisa le navire, et nous restmes
dans le plus grand pril jusqu' la troisime heure de la nuit ; alors
chacun saisit une rame ou un fragment quelconque pour essayer
de s'chapper la nage, et, grce la misricorde de Dieu, nous
fmes, vers la sixime heure du jour, pousss la cte aux
environs de Sleucie et cinq stades de cette ville. Nous tions aunombre de quarante-deux personnes ; mais Jean ne s'y trouvait
pas. Nous restmes longtemps tendus sur la rive, accabls de
froid, de fatigue et de crainte et comme sans vie, et nous entrmes
ensuite Sleucie, ayant perdu tout ce que nous possdions
n'ayant rien manger. Nous demandmes du pain que l'on nous
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donna, et mes compagnons d'infortune se soulevrent contre moi,
disant : "Quel est cet homme qui tait avec toi ? C'est un
magicien qui, par ses malfices, a fait prir le navire afin de
s'enfuir aprs s'tre empar de notre avoir, et tu es son complice.
Remets-nous ce magicien, ou nous ne te laisserons pas sortir, cartu mrites la mort ; dis-nous d'o vient cet enchanteur ; nous qui
tions dans le navire, nous nous trouvons tous ici, et lui seul a
disparu".
Ils excitrent ainsi contre moi les habitants de Sleucie et ils me
jetrent en prison, et, le lendemain, ils me conduisirent devant le
gouverneur de la ville, qui, me parlant avec svrit, me dit :
"D'o es-tu et quelle est ta religion ? Quels sont tes moyens desubsistance et quel est ton nom ? Dis-nous toutes ces choses avant
que nous te livrions aux tortures". Je rpondis : "Je suis du pays
des Hbreux, je suis Chrtien de religion ; mon nom est
Prochore ; j'ai t jet ici par un naufrage ainsi que ceux qui
m'accusent". Le gouverneur dit : "Comment se fait-il que vous
vous soyez tous sauvs et que ton compagnon seul ne paraisse pas
; il est certain que vous tes accuss d'tre des magiciens etd'avoir fait prir le navire par vos malfices, et, afin qu'on ne vous
souponne pas de sortilges, toi seul tu es rest avec l'quipage,
mais ton compagnon s'est enfui en emportant les biens qu'il y
avait bord ; peut-tre aussi que, comme vous tiez des
magiciens coupables d'avoir fait verser beaucoup de sang, la
sentence divine a condamn ton compagnon prir, et toi seul tu
as chapp la mort afin de trouver ton chtiment dans cette ville
; dis-nous donc de suite si ton compagnon a pri ou s'il est
soustrait au danger".
Je rpondis en versant des larmes : "Je te rpondrai, au sujet des
questions que tu m'adresses, avec une franchise entire et selon ce
que je sais. Et d'abord, s'il faut parler de moi, je ne suis pas un
magicien, je suis Chrtien et disciple de Jsus-Christ ; le Seigneur
Jsus-Christ, avant de monter au ciel, a donn cet ordre ses
aptres : "Allez dans le monde entier et prchez l'Evangile toutes cratures, et baptisez toutes les nations qui voudront
croire". Aprs son ascension, ses aptres, runis en un mme lieu,
ont tir au sort dans quelle contre chacun d'eux devait aller
prcher. Et le sort ayant attribu l'Asie Jean, mon matre, qui
tait avec nous dans le navire, il en fut vivement pein, et comme
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il se refusa d'abord ce qui avait plu l'Esprit-Saint, il lui fut
rvl qu'en punition de son pch il prouverait une tempte sur
mer ; lorsque nous fmes embarqus, il me rvla l'avance ce
que nous devions souffrir et me prescrivit de l'attendre Ephse
pendant trois moi et qu'il viendrait dans cet intervalle, s'il taitencore vivant, afin d'accomplir la tche que Dieu lui avait confie
; il ajouta que s'il ne se montrait pas avant l'expiration du dlai
qu'il fixait, je devais retourner dans mon pays. Mon matre n'est
donc pas un magicien ; c'est un homme choisi et inspir par le
Seigneur, prdicateur intrpide de la vrit et trs ferme dans la
foi de Jsus-Christ.
Lorsque j'eus ainsi parl, un nomm Slemnis, qui tait venud'Antioche, fut frapp des paroles que j'nonais avec fermet et
il demanda qu'on me laisst me retirer, et j'en eus la permission.
En quittant Sleucie, j'arrivai quarante jours aprs dans un village
qui tait au bord de la mer, et, y trouvant une fosse, j'y entrai pour
me reposer aprs les grandes fatigues que j'avais prouves ; et,
peine y tais-je, que je vis une grande tempte qui jeta un homme
sur le rivage de la mer ; j'eus grande compassion pour lui, carj'avais prouv de mon ct les horreurs du naufrage. Je courus
vers lui, sans savoir que c'tait Jean, et, m'approchant, je pris sa
main et je le relevais, et il me reconnut ; je le reconnus galement
et nous nous embrassmes mutuellement en versant beaucoup de
larmes et en rendant grces Dieu qui tend sa misricorde sur
tous les hommes et qui seul, dans sa puissance infinie, les dlivre
des prils ; nous restmes quelque temps privs de la parole par
suite de l'excs de notre joie ; quand Jean fut revenu lui, il se
mit me raconter ce qui lui tait arriv et comment il tait rest
quarante jours, selon la volont de Dieu, ballott par les flots le
long du rivage, et je lui fis de mon ct le rcit de ce que j'avais
souffert.
CHAPITRE II
Nous nous levmes ensuite, et, nous loignant de cet endroit,
nous entrmes dans un village, o, ayant demand du pain et de
l'eau, nous mangemes et nous bmes, et nous nous mmes
ensuite cheminer vers Ephse. Et quand nous fmes entrs dans
la ville, nous nous arrtmes sur la place de Diane o taient les
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bains publics, et nous nous rendmes chez un homme qui
s'appelait Dioscoride. Et Jean m'instruisait en disant : "Mon fils
Prochore, que personne en cette ville n'apprenne de toi qui nous
sommes, ni pourquoi nous sommes venus, jusqu' ce que Dieu
nous ait rvl sa volont et ce que nous devons suivre ; mettonsseulement confiance en Jsus-Christ Notre-Seigneur". Et lorsqu'il
me parlait ainsi, voici qu'une femme romaine, nomme Romca,
qui tait robuste de corps et strile, avait t charge de la
direction du bain, et se fiant sur sa force, elle frappait rudement et
maltraitait les esclaves qui taient chargs du service du bain ; de
sorte qu'aucun mercenaire ne voulait souffrir. Et quand elle nous
vit assis solitairement et la tte penche, elle pensa que noustions des hommes dpourvus de ressource et tombs dans
l'indigence, et elle crut que nous pouvions lui tre utiles et lui
fournir nos services bon compte, et elle dit Jean : "D'o es-
tu ?" Il rpondit : "Je suis un tranger". Et il dit : "De la Jude".
Alors elle dit : "Quelle religion suis-tu ?" Et il rpliqua : "Je suis
Chrtien". Elle demanda ensuite : "Comment es-tu venu ici ?" Il
rpondit : "J'ai fait naufrage, car tel tait le bon plaisir de Dieu,mais j'en suis chapp et je suis venu en cette ville". Et elle dit :
"Veux-tu me servir et travailler chauffer les bains ? je te
fournirai ce qui est ncessaire pour le besoin de ton corps". Il
rpondit qu'il le voulait bien, et elle me dit : "Et toi, d'o es-tu ?"
Jean rpondit : "Il est notre frre". Alors Romca dit : "Il sera
ncessaire pour verser l'eau", et elle nous conduisit dans les bains,
et elle chargea Jean de chauffer la chaudire et moi de verser
l'eau, et elle nous donnait chaque jour trois onces de pain, et elle
nous promettait dans l'anne ce qui tait ncessaire notre corps.
Le quatrime jour aprs que nous fmes entrs en fonction, Jean,
mon matre, tait occup entretenir le feu, et comme il
s'acquittait assez mal de cet emploi, Romca entra et, aprs lui
avoir dit des injures et l'avoir frapp, elle lui adressa des menaces
dans le cas o il ne ferait pas mieux son ouvrage. Moi, Prochore,
de l'endroit o je rpandais l'eau, j'entendis tout ce que Romcaavait dit, et comme elle avait trait mon matre avec inhumanit,
je fus grandement troubl ; je me tus cependant, et je ne profrais
pas un seul mot ; mais mon matre sachant, par rvlation, que
j'tais triste cause de lui, me dit : "Mon fils Prochore, lorsque le
sort m'assigna l'Asie, mon me hsita, et j'prouvai une grande
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peine : j'ai prouv un naufrage, et toi, ainsi que ceux qui taient
avec nous, vous avez eu le mme sort cause de moi ; je suis
rest pendant quarante jours le jouet des vagues irrites, jusqu'
ce que Dieu, mon Seigneur et mon Matre, contre lequel j'avais
pch, eut bien voulu me ramener terre, et tu te laisseraistroubler par les paroles insultantes d'une femme, te laissant agiter
par de vaines tentations ! Marche dans l'accomplissement du
devoir qui t'est impos, et excute-le fidlement ; car Notre-
Seigneur Jsus-Christ, crateur de toute choses, a t soufflet et
flagell par sa crature, et notre pieux Matre nous a donn un
exemple de patience, afin que nous soyons rsigns dans toutes
nos souffrances, selon la recommandation qu'il nous a faite,lorsqu'il a dit : "Vous possderez vos mes dans la patience (2)".
Jean ayant dit ces choses, je m'occupai de l'ouvrage que Romca
m'avait command. Et tant venue de nouveau, elle demanda ce
qui tait ncessaire nos corps. Et Jean dit : "Nous avons en
quantit suffisante ce qui est ncessaire nos corps, et nous nous
appliquons avec zle l'ouvrage dont nous sommes chargs".
"Et comment se fait-il", dit-elle, "que chacun ici vous signalecomme des maladroits". Jean rpondit : "C'est que nous n'avons
jamais eu nous livrer une occupation de ce genre, et qu'il est
difficile de bien faire ce qu'on commence faire pour la premire
fois ; mais si nous persistons, nous deviendrons habiles ; en tout
mtier on ne saurait, ds le dbut, agir habilement et sans
commettre d'erreur".
Lorsqu'il eut ainsi parl, la femme se retira. Mais le diable qui,
ds le commencement, cherche nuire aux bons, se transforma
sous les traits de cette femme, et il vint frapper rudement Jean, en
lui adressant de violentes injures et lui disant : "Je t'avais confi
une tche que tu n'as pas su remplir ; je ne veux plus te garder ;
fais de plus en plus chauffer la chaudire pour que je te jette au
milieu". Et arrachant le manteau qui couvrait Jean, il dit en
multipliant ses menaces : "Si tu ne veux pas que je t'te la vie,
sors ; je n'entends pas que tu me serves davantage". Mais Jean,instruit par l'esprit de Dieu qui c'tait le dmon qui habitait dans
ces bains, invoqua le nom de Jsus-Christ, et le mit aussitt en
fuite.
Et, un matin, Romca vint et dit Jean : "On dit que tu t'acquittes
mal de ta besogne, mais je sais qu'on parle ainsi afin que je te
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rende la libert, et, je n'entends pas que tu me quittes ainsi ; si tu
veux t'en aller, je te priverai violemment d'un de ces membres qui
te sont le plus ncessaires". Jean ne lui rpondit rien. Et alors la
femme voyant combien il tait patient et rsign, se mit le
presser durement et se fcher, et elle dit : "Tu n'agis pas commemon esclave, mais comme un homme libre ; que rponds-tu ? est-
ce que tu ne reconnais pas que tu es mon esclave ? rponds-moi
donc". Jean dit : "Il est vrai que nous sommes tes esclaves ;
j'entretiens le feu, et Prochore verse l'eau". Et Romca tait alors
lie avec un homme de loi, et elle alla vers lui et lui dit : "Mes
parents m'ont autrefois laiss des esclaves qui, s'tant enfuis, ont
t retrouvs aprs bien des annes ; mais j'ai perdu les titres deleur achat ; ils sont venus vers moi, puis-je renouveler ces titres
d'achats ?" Et il rpondit : "S'ils ne refusent pas de convenir qu'ils
sont des esclaves que tes parents t'ont laisss, tu peux renouveler
les titres, eux tant prsents et disant : Nous sommes tes
esclaves".
Et Jean sachant, par la rvlation de l'esprit de Dieu, ce qui se
passait, me dit : "Mon fils Prochore, la femme que nous servonsveut nous faire avouer que nous sommes ses esclaves, et si nous
en convenons, elle s'est dj assure de tmoins dignes de foi,
pour recevoir notre dclaration, et elle aura un acte authentique
qui nous mettra en sa servitude. Ne t'afflige pas de cela, mon fils,
mais rjouis-toi de ce que nous avons t jugs dignes de souffrir
l'outrage pour le nom de Jsus-Christ". Et tandis que Jean me
parlait ainsi, voici que Romca vint, et elle prit Jean par la main,
et elle se mit le battre, et elle dit : "Esclave fugitif, pourquoi,
lorsque ta matresse vient, n'accours-tu pas au-devant d'elle et ne
la reois-tu pas avec le respect que tu lui dois ? Tu crois pouvoir
retrouver ta libert, mais tu resteras soumis ta matresse" ; et
elle le frappait au visage pour l'effrayer et pour qu'il ft sa
volont, et elle disait : "Est-ce que tu ne me rpondras pas ? est-ce
que tu n'es pas mon esclave ?"
Jean lui rpondit : "Je t'ai dj dit que nous tions tes esclaves ;j'allume le feu, et Prochore verse l'eau". Romca rpondit : "De
qui es-tu l'esclave, esclave fugitif ?" Et Jean dit : "Pourquoi veux-
tu que nous disions de qui nous sommes esclaves ?" Et elle dit :
"Dites, nous sommes tes esclaves". Et Jean dit : "Nous t'avons
dj dit, et nous reconnatrons par crit, que nous sommes tes
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esclaves". "Je veux", dit-elle, "que ce soit attest par votre aveu
devant trois tmoins". Et Jean rpondit : "Ne diffre pas,
aujourd'hui mme nous ferons ce que tu demandes". Et Romca,
sortant du quartier du temple de Diane, nous conduisit devant des
tmoins, et fit mettre nos dclarations par crit, et nous chargeachacun d'une besogne particulire. Et maintenant parlons de ces
bains.
CHAPITRE III
Lorsqu'on les construisit, on dit que les dmons dployrent en
cette occasion tous leurs artifices, car, au moment o l'on encreusait les fondements, ils persuadrent quelques enchanteurs
d'y faire ensevelir vivante une jeune fille, et ils dirent que cela
porterait bonheur l'difice, mais il en advint tout autrement ; car
le diable sjournait en ce lieu et il se jouait des hommes, et trois
fois dans l'anne, il touffait dans ces bains un jeune homme ou
une jeune fille. Un habitant d'Ephse, nomm Dioscoride, avait
observ quelle poque ce malheur se renouvelaithabituellement. Il avait un fils g de vingt ans et d'une grande
beaut ; le dmon lui tendait des embches, cherchant
l'trangler. Il vint un jour aux bains accompagn de ses serviteurs,
et j'tais l, tenant le vase ncessaire pour remplir mes fonctions.
Mais le dmon immonde s'lanant subitement, l'trangla et
l'tendit mort, et ses serviteurs se retirrent pleins d'effroi et de
dsolation, disant : "Hlas ! malheureux que nous sommes, que
ferons-nous, car notre matre est mort ?" Et lorsque Romca
apprit cela, elle dnoua les rubans qui ornaient sa tte, et elle
s'arracha les cheveux, et elle poussait de grands cris, disant :
"Malheur moi, misrable ! que dirai-je mon seigneur
Dioscoride lorsqu'il apprendra que son fils unique est mort ? O
grande Diane des Ephsiens, vient notre aide ; montre ta
puissance l'gard de ce jeune homme ; nous tous, habitants
d'Ephse, hommes ou femmes, nous reconnaissons que tugouvernes toutes choses, et de grands prodiges s'accomplissent
par ton entremise ; coute ta servante, et rends le fils de mon
matre, afin que tous ceux qui esprent en toi sachent combien ton
pouvoir est tendu ; rends-nous ce jeune homme et rpare ce
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malheur, parce que tu es la desse vritable, et qu'il n'y a pas de
dieu plus puissant que toi".
Et aprs qu'elle eut arrach ses cheveux, et fut reste dans cette
dsolation depuis la troisime heure jusqu' la neuvime, une
grande foule s'tait rassemble ; les uns pleuraient le jeunehomme, et les autres s'affligeaient cause de Romca.
Et tandis que cela se passait, Jean ayant accompli sa tche, vint
moi et me dit : "Mon fils Prochore, que dit-on de cet
vnement ?" Et quand Romca vit que nous parlions ensemble,
avant que je n'eusse eu le temps de rpondre, elle vint et saisit
Jean, et elle lui dit : "Esclave fugitif, les malfices dont tu as us
depuis le jour que tu es venu auprs de nous sont enfin dcouverts; c'est cause de toi que la grande Diane m'a abandonne. Ou tu
me rendras le fils de mon matre Dioscoride, ou je t'terai la vie
cette heure". Jean rpondit : "Qu'est-ce qui t'est arriv, matresse ?
raconte-le moi". Elle pleura de fureur, se mit le frapper et
dire : "Mchant serviteur, prompt manger et paresseux quand il
faut travailler, est-ce que tous les habitants d'Ephse ne savent pas
ce qui est arriv, et que tu es venu vers moi, et tu te rjouis enm'insultant et en feignant d'ignorer que le fils de Dioscoride, mon
matre, est mort dans les bains ?" Alors Jean s'loigna d'elle,
n'ayant aucun ressentiment ni aucune peine pour ce qu'il avait
prouv, et, un moment aprs, il entra dans les bains, et il en
chassa l'esprit immonde, et par la puissance de Jsus-Christ
Notre-Seigneur, il rappela l'me dans le corps du jeune homme, et
il sortit des bains, tenant ce jeune homme par la main, et il le
conduisit Romca, et il lui dit : "Reois le fils de ton matre".
Quand elle le vit, elle fut frappe de terreur, et elle tomba terre
comme morte et prive de sentiment. Jean la prenant par la main,
la releva doucement, et elle tait tellement trouble par l'aspect
d'un aussi grand miracle, qu'elle resta immobile comme une
pierre, et que ce ne fut qu'aprs un espace de deux heures qu'elle
reprit tout fait ses sens. Et elle n'osait regarder le visage de
l'aptre ; mais remplie d'une confusion extrme, elle pensait enelle-mme : "Comment oserai-je lever les yeux sur celui dont j'ai
fait mon esclave lorsqu'il ne l'tait pas, et contre lequel j'ai avanc
des mensonges ? il ne mritait aucun mauvais traitement, et je le
frappais sans cesse. O malheureuse ! qu'ai-je fait ? mort ! je
t'invoque, viens et absorbe une misrable telle que moi". Et
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derechef, tombant en pmoison, elle se jeta par terre ; et Jean, la
voyant ainsi change, la prit par la main, la releva et la munit du
signe de la croix sainte. Et revenue elle, elle tomba aux pieds de
l'aptre en pleurant, et en disant : "Je te demande avec instance,
dis-nous qui tu es, car je suis sre que tu es dieu ou fils de dieu,puisque tu opres de tels prodiges".
Jean lui rpondit : "Je ne suis ni dieu, ni fils de dieu, mais je suis
le disciple du Seigneur Jsus-Christ, Fils du Dieu vivant, et j'ai
repos sur sa poitrine, et j'ai entendu de lui les mystres que je
t'annonce ; si tu crois en lui, tu seras sa servante, comme je suis
son esclave". Alors Romca, couverte de rougeur et de honte, dit
l'aptre Jean : "Homme de Dieu, je te prie d'oublier tous lestorts que j'ai eus ton gard ; pardonne-moi de t'avoir frapp,
maltrait et injuri, et surtout de ce que, usant de faux
tmoignages ton gard et celui de ton compagnon, j'ai menti,
car j'ai dit que vous tiez mes esclaves". Jean lui dit : "Crois au
Pre, au Fils et au Saint-Esprit, et tes fautes te seront remises".
Romca rpondit l'aptre : "Homme de Dieu, je crois tout ce
que j'entendrai de ta bouche". Et tandis que cela se passait, unefoule trs nombreuse s'tait runie, et un des serviteurs de
Dioscoride courut lui annoncer ce que Jean, l'homme de Dieu,
avait accompli, et comment son fils tait mort dans le bain, et
comment Jean l'avait ressuscit, et comment une grande multitude
de peuple l'embrassait revenu la vie. Lorsque Dioscoride apprit
la mort de son fils, saisi aussitt de douleur et d'effroi, il expira.
Et celui qui lui avait apport cette nouvelle revint aux bains o
Jean enseignait, et o tait galement le fils de Dioscoride, et il
s'criait : "Hlas ! Dioscoride, mon matre, est mort".
Lorsque Thon, fils de Dioscoride, eut appris le trpas de son
pre, il se leva aussitt, et, quittant Jean, il courut vers son pre,
et il le trouva sans vie, et tendu par terre. Et il retourna vers Jean,
livr une amre douleur, et se jetant aux pieds de l'aptre, il dit :
"O homme de Dieu, toi qui m'as rappel la vie aprs ma mort, je
te conjure de venir mon secours, car mon pre a expir aussittqu'il a appris ma mort ; ne force pas celui que tu as arrach au
trpas d'prouver de nouveau la mort en succombant sa
douleur". Et Jean, qui tait plein de bont, lui dit : "Ne te troubles
pas, Thon, car la mort de ton pre sera la vie pour lui et pour
toi". Et prenant Thon par la main, il lui dit : "Allons vers ton
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pre Dioscoride". Romca le suivait, ainsi qu'une grande foule de
gens livrs la douleur et versant des larmes. Et Thon introduisit
Jean auprs de son pre, et Jean, lui prenant la main, lui dit :
"Dioscoride, lve-toi, je te le dis au nom de Notre-Seigneur Jsus-
Christ, Fils du Dieu vivant" ; et aussitt Dioscoride se relevaplein de vie ; et la foule des assistants, ayant vu ce miracle, louait
la grandeur de Dieu ; mais il y en avait parmi eux qui disaient que
Jean tait magicien ; d'autres, d'un jugement plus sain, affirmaient
que les magiciens n'avaient pas le pouvoir de ressusciter des
morts.
Lorsque Dioscoride fut revenu lui, il dit Jean : "N'est-ce pas
toi, homme de Dieu, qui as ressuscit mon fils d'entre les morts ?"Jean rpondit : "Ce n'est pas moi qui l'ai ressuscit, c'est Jsus-
Christ, Fils de Dieu, qui prche par ma bouche, qui l'a ressuscit".
Et aussitt Dioscoride, tombant ses pieds, dit : "Que faut-il que
je fasse pour que je sois sauv et que je devienne le serviteur de
Jsus-Christ, Fils de Dieu ?" Jean lui rpondit : "Crois au nom du
Pre, et du Fils et du Saint-Esprit, et reois le baptme". Et
Dioscoride dit Jean : "Mon fils et moi, nous remettons en tesmains tout ce que nous possdons".
Jean rpondit : "Ces biens terrestres ne sont ncessaires ni mon
Dieu, ni moi". Et depuis cette heure Dioscoride et Thon
suivirent Jean ; il les enseignait, disant : "Dieu qui tend sa
misricorde sur tous, a envoy sur la terre son Fils qui est n de la
Vierge Marie, qui a souffert, qui est mort et qui a t enseveli, qui
est descendu aux enfers, et qui, en arrachant les fidles et
triomphant de la mort (3), est ressuscit le troisime jour ; aprs
sa rsurrection, il a apparu pendant quarante jours nous, ses
douze aptres ; il a mang et bu avec nous, et il nous a command
d'aller prcher l'Evangile dans le monde entier ; il nous a donn
puissance sur toutes choses, nous mettant mme de gurir toutes
les maladies, de ressusciter les morts, de chasser le dmon, et de
baptiser les hommes pour la rmission des pchs. Et non
seulement il nous a accord cette puissance, mais il l'a aussidonne ceux qui croient en lui par notre prdication, et surtout
ceux qui, distingus par la ferveur de leur zle, seront aptes
nous seconder dans le saint ministre. Ceux qui ne croient pas
seront condamns".
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Et Jean ayant termin son discours, Dioscoride et son fils
s'approchrent de lui, le priant de les baptiser. Et Jean leur dit :
"Que Dieu te reoive ainsi que ton fils". Et tandis qu'il parlait
encore, voici que Romca apporta les actes qu'elle avait fait
dresser pour constater notre servitude, et elle les remit monmatre Jean, et il les dchira aussitt. Et ensuite il baptisa
Dioscoride dans sa maison, ainsi que son fils Thon, et Romca.
Et lorsque nous sortions de chez Dioscoride, nous vnmes aux
bains o nous avions t employs comme esclaves, et Jean
chassa de tout le territoire l'affreux dmon qui avait trangl
Thon, et Dioscoride nous ramena ensuite en sa maison, et nous
nous mmes table, rendant grces Dieu ; nous mangemes etnous bmes, et nous restmes avec lui jusqu'au soir.
CHAPITRE IV
Le lendemain matin toute la ville d'Ephse clbrait la fte de
Diane, et la foule se rendait au temple o l'idole de Diane s'levait
une grande hauteur. Jean vint et monta au temple, et il se plaa la droite de l'idole, et les habitants venant pour sacrifier taient
revtus de robes blanches ; Jean qui avait gard les vtements
salis avec lesquels il travaillait dans les bains, se faisait
remarquer, et les Ephsiens, remplis d'indignation et de colre,
prirent des pierres pour les lui jeter, mais, par la puissance divine,
les pierres qu'ils lanaient contre l'aptre, se dirigeaient contre la
statue de Diane, de sorte qu'elle fut toute brise ; et eux, en
voyant qu'aucune des pierres qu'ils lanaient, ne pouvait toucher
Jean, grinaient des dents, et plusieurs de ceux qui voyaient ce
spectacle riaient.
CHAPITRE V
Lorsque l'idole se fut brise en tombant, Jean dit au Ephsiens :
"Hommes d'Ephse, pourquoi vous livrez-vous de pareillesfolies en rendant un culte aux dmons et en abandonnant le vrai
Dieu, auteur du monde entier et votre crateur ?" Dieu protgeait
alors son aptre Jean contre la colre des Ephsiens, et aucun
d'entre eux ne pouvait mettre les mains sur lui ; et Jean leur
disait : "Voici que votre desse est dtruite, et qu'elle a t brise
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par les pierres que vous vouliez lancer contre moi ; relevez-la et
rtablissez-la, comme elle tait et, si elle a quelque pouvoir,
priez-la d'exercer sa vengeance contre moi qui ai t la cause de
sa ruine ; qu'elle donne quelque tmoignage de sa puissance qui
m'amne croire qu'elle est une desse ; autrement il sera videntque votre desse n'a aucun pouvoir".
Les Ephsiens, entendant ces paroles, furent remplis de fureur, et
ils voulaient derechef jeter les pierres l'aptre, mais les pierres
retombaient sur eux, et ils se blessaient mutuellement. Et Jean, les
voyant anims d'une rage comme celle des dmons, et se frappant
les uns les autres, leur dit : "O hommes d'Ephse, pourquoi
exercez-vous votre fureur les uns contre les autres ? arrtez-vouset voyez la terrible puissance du vrai Dieu que vous provoquez
contre vous par vos excs car vous regardez comme de la folie la
parole que je vous ai apporte pour votre salut ; arrtez-vous
donc, et regardez avec attention".
Alors l'aptre tendit sa main vers l'Orient en gmissant, et il dit :
"Seigneur Jsus-Christ qui agis selon ta misricorde et ta
compassion, montre ces hommes que tu es le vrai Dieu et qu'iln'y a pas d'autre Dieu que toi". Et quand il eut parl ainsi, il se fit
un grand tremblement de terre, et quatre-vingts hommes prirent,
et les autres, voyant ce qui s'tait pass, tombrent aux pieds de
Jean, disant : "Seigneur, nous te prions de faire revenir ces morts
la vie, et nous croirons en ton Dieu que tu nous prches". Jean
leur rpondit : "Hommes d'Ephse, vous avez le cur dur et lent
croire au vrai Dieu ; je sais que, si ces morts ressuscitent, votre
cur restera endurci, ainsi que l'a t celui de Pharaon aprs qu'il
eut vu des miracles et des prodiges". Toutefois les Ephsiens
persvraient le prier en faveur de ceux qui avaient pri et ils se
prosternaient devant l'aptre. Alors Jean, se rendant leur
demande, leva les yeux au ciel, et resta longtemps dans le silence,
en gmissant et en versant des larmes, et il dit : "Seigneur Jsus-
Christ, toi qui es descendu sur la terre, pour sauver le genre
humain, coute les prires de ton serviteur qui t'implore, et remetsles pchs de ton peuple ; fais que ceux qui sont morts en ce lieu
reviennent la vie, afin qu'ils apprennent que tu es le Dieu
vritable, et qu'ils croient en toi qui m'as envoy, et accorde-moi,
ton serviteur, le don de leur prcher fidlement ta parole". Et
quand Jean, le serviteur de Dieu, eut parl ainsi, le tremblement
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de terre cessa, et les morts qui gisaient par terre se relevrent, et
tombant aux pieds de Jean, ils voulaient l'adorer ; mais Jean se
mit leur annoncer la divinit unique du Pre, du Fils et du Saint-
Esprit qu'ils devaient adorer, et que les trois personnes n'ont
qu'une seule substance, et il leur enseigna beaucoup d'autreschoses que nous omettons d'crire dans ce livre.
CHAPITRE VI
Dioscoride nous conduisit ensuite chez lui et, aprs y tre rests
quelque temps, nous nous rendmes en un endroit qui est appel
le rempart de la ville, et nous y trouvmes un homme qui taitboiteux et paralytique depuis douze ans et que son infirmit
mettait hors d'tat de se mouvoir ; lorsqu'il vit Jean, il se mit
crier haute voix : "Aie piti de moi, Jean, aptre du Dieu
vivant". Et Jean reconnaissant qu'il avait la foi, lui dit : "Au nom
du Pre, et du Fils, et du Saint-Esprit, lve-toi", et aussitt le
malade se leva, parfaitement guri.
CHAPITRE VII
Mais le dmon qui habitant dans le temple de Diane, voyant ce
qu'avait fait Jean et que l'idole tait brise et qu'il avait t
expuls de la ville, prit la forme d'un soldat ayant en sa main des
papiers, et il s'assit en un lieu leva, et il criait avec force et il
pleurait. Deux soldats passrent par l et voyant un homme revtu
du costume militaire qui criait et qui pleurait, ils s'approchrent
en disant : "Ami, qu'as-tu, et quelle est la cause de ta douleur ?"
Lui ne rpondait rien, mais il continuait ses exclamations, et
rpandant toujours des pleurs, il tenait des papiers falsifis. Et ils
lui dirent derechef : "Apprends-nous le motif de ton trouble, et si
nous le pouvons, nous y porterons remde".
Continuant de gmir et de manifester la plus vive affliction, il
rpondit : "Je suis accabl de dsespoir et je songe me donner lamort. Si vous voulez venir mon aide, je vous raconterai tout ce
qui m'est arriv ; si vous ne le voulez pas, pourquoi vous
rvlerai-je le secret de ma mort ?" Les soldats lui rpondirent :
"Ton aspect et on costume montrent que tu es un homme
honorable ; tu peux savoir si nous sommes en mesure de te
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secourir ou non". Le dmon leur rpondit : "Vous le pouvez". Et
les soldats lui dirent alors : "En quoi pouvons-nous t'assister ?" Le
dmon leur dit : "Jurez-moi par la grande Diane que vous ne me
refuserez pas votre secours, et je vous raconterai tout ce qui m'est
arriv, et montrez-vous bienveillants mon gard, car je suis untranger ; je vous en aurai une reconnaissance infinie, et vous
m'aurez sauv la vie". Les soldats jurrent de l'assister dans son
infortune et de lui prter tout leur appui. Alors le dmon leur
montra des anneaux d'or et leur dit : "O mes amis fidles, voici ce
qui vous est rserv pour vous ddommager de vos peines". Les
soldats redoublrent d'instances auprs de lui et lui disaient :
"Raconte-nous, ami, la suite de tes malheurs". Alors le dmon, enpleurant et en hurlant, leur fit le rcit suivant :
"Je suis arriv de Csare ; le gouverneur de Jrusalem avait
confi ma garde deux magiciens, l'un s'appelait Jean et l'autre
Prochore. Je les gardai trois jours en prison ; le quatrime jour, ils
furent conduits devant le juge et ils furent convaincus d'avoir
commis des crimes nombreux. Le juge voyant quelle tait leur
sclratesse, ne voulut pas dcider lui-mme de ce qu'il fallaitfaire d'aussi grands coupables et il ordonna qu'ils fussent
ramens en prison. Je les y conduisis, mais ils trouvrent moyen
de s'vader, et le juge l'ayant appris, m'ordonna de me mettre
leur poursuite, m'annonant qu'il me pardonnerait, si je les
retrouvais, mais que si je ne les ramenais pas, il faudrait que je
subisse la mort ou que je ne revinsse jamais en Jude. Je sais
quelle est la colre qui anime le juge contre ces malfaiteurs, et je
n'oserai jamais reparatre devant lui si je ne les ramne pas". Et le
dmon leur montra derechef des anneaux d'or disant : "Voici ce
que j'ai emport de mon pays avec moi afin de ne pas tre sans
ressources", et il montra des actes supposs qu'il disait contenir
leurs aveux ; il ajouta qu'il avait entendu dire beaucoup de gens
que les fugitifs taient Ephse ; "c'est pourquoi, dit-il, j'y suis
venu comme un exil, abandonnant mon pays, ma femme et mes
enfants. Je vous prie donc, vous qui voulez bien m'accorder votreamiti, de ne pas refuser votre appui un malheureux et de ne pas
me priver de votre assistance".
Les soldats lui rpondirent : "Ne te laisse pas accabler par la
douleur et ne te fais aucun mal toi-mme. Ces magiciens sont
ici, et nous te prterons notre secours pour que tu te saisisses
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d'eux". Le dmon rpondit : "Je n'ose pas me montrer eux car je
crains qu'ils ne m'chappent encore par les ressources de leurs
sortilges, mais vous, mes amis, attirez-les plutt dans quelque
lieu cart, et tuez-les sans que personne le sache". Mais ils lui
rpondirent : "Il vaut mieux que nous les remettions entre tesmains ; car si nous les tuons, comment pourras-tu retourner en ton
pays ?" Le dmon dit : "Tuez-les, mes amis ; je n'ai plus aucune
envie de revenir", et il en fit tant par ses paroles que les soldats lui
promirent de les tuer condition de recevoir, pour leur
rcompense, les anneaux d'or qu'il avait avec lui.
Mais Jean connut toutes ces choses par la rvlation de l'Esprit de
Dieu, et il sut tout ce que le dmon immonde machinait contrenous, et il me dit : "Mon fils Prochore, sache que le dmon qui
habite dans le temple de Diane a suscit deux soldats contre nous
et qu'il leur a dit beaucoup de mensonges. Dieu m'a fait savoir
tout ce qu'il a dit. Maintenant sois ferme et prpare ton me la
tentation, parce que le dmon dirige contre nous beaucoup de
machinations et qu'il nous fatiguera par des tribulations
multiplies". Et lorsque l'aptre eut dit ces paroles, les soldatsvinrent et se saisirent de nous, et Dioscoride tait alors absent. Et
Jean leur dit : "De quoi nous accusez-vous, et pourquoi voulez-
vous vous emparer de nos personnes ?" Ils rpondirent : "A cause
de vos nombreux malfices" ; et Jean dit : "Qui est-ce qui est
notre accusateur ?" Et ils dirent : "Laissez-vous conduire la
prison, et vous verrez ensuite quel est votre accusateur". Alors
Jean dit : "Vous ne pouvez, ni ne devez exercer aucune violence
contre nous", mais ils commencrent nous frapper et nous
conduisirent dans la maison d'un habitant de la ville, ayant le
dessein de nous tuer, selon la promesse qu'ils avaient faite au
dmon. Romca, sachant qu'ils s'taient empars de nous,
accourut auprs de Dioscoride, lui racontant ce qui se passait. Et
Dioscoride vint aussitt, et il nous dlivra de leurs mains, disant :
"Il ne vous est pas permis de mener en prison des hommes contre
lesquels il n'y a aucune accusation ; ils sont avec moi dans mamaison ; si quelqu'un veut les accuser, qu'il vienne, afin qu'ils
soient jugs selon les lois". Alors les soldats dirent entre eux :
"Allons et amenons leur accusateur qui exposera devant le juge
ses justes sujets de plainte. Nous ne serions gure couts,
Dioscoride s'opposant nous, et nous aurions de la peine
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l'emporter sur lui". Ils revinrent donc l'endroit o ils avaient
d'abord rencontr le dmon ; et ne le trouvant pas, ils furent tout
troubls et saisis d'inquitude, et ils disaient : "Comment ferons-
nous, puisque nous ne le retrouvons plus ? Si Dioscoride trouve
que nous n'avons pas dit la vrit et si nous sommes hors d'tat deprouver ce que nous avons avanc, il pourra, comme il possde
une grande autorit, nous faire chtier trs svrement". Et tandis
qu'ils parlaient ainsi, le dmon vint eux, revtu comme
prcdemment d'un costume militaire, et il leur dit en les
rprimandant : "Vous manquez de courage pour me servir". Mais
ils lui racontrent tout ce qu'ils avaient fait, et comment
Dioscoride nous avait dlivrs d'entre leurs mains, et ils dirent :"Si tu viens avec nous, il faudra bien qu'on nous les rende".
"Allons", dit-il, et il allait derrire eux, criant et hurlant ; la foule
s'attroupa autour d'eux, et le dmon racontait tout ce qu'il avait
dj dit aux soldats, et les soldats confirmaient son tmoignage, et
les auditeurs furent tous remplis de colre, et il y avait parmi eux
beaucoup de Juifs. Et ils se rendirent la demeure de Dioscoride,
frappant fortement aux portes et criant : "Livre-nous cesmagiciens, ou nous mettons le feu ta maison, et nous te ferons
prir, toi et ton fils". Et la ville entire tait souleve et criait :
"Remets-nous ces malfaiteurs ; lors mme que tu serais le
gouverneur, tu n'aurais pas le droit de les protger".
Jean, voyant tout ce tumulte, dit Dioscoride : "Nous mprisons
les biens de ce monde, et nous n'avons aucun attachement pour
nos corps ; Jsus-Christ est notre vie, et la mort est pour nous un
profit ; notre Matre nous a enseign porter chaque jour notre
croix et le suivre ; livre-nous donc au peuple". Dioscoride,
entendant ces paroles, rpondit Jean : "Que plutt ma maison
soit dtruite par le feu, et que mon fils et moi, nous vous suivions
afin de gagner Jsus-Christ". Jean rpondit : "Ni toi, ni ton fils, ne
devez cette heure souffrir le moindre mal, et pas un des cheveux
de votre tte ne doit prir : livre-nous cette foule". Dioscoride
rpondit : "Si je vous livre, je livrerai aussi mon fils". Jean dit :"Il est heureux que cette foule se soit rassemble, car ce
rassemblement produira de grands biens ; laisse-nous sortir en
sret ; reste dans ta maison avec ton fils, et vous verrez la gloire
de Dieu". Et aussitt que nous fmes sortis, la foule se saisit de
nous et nous conduisit au temple de Diane. Et lorsque nous fmes
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arrivs au temple, Jean dit ceux qui nous tenaient : "Habitants
d'Ephse, quel est ce temple ?" Et ils rpondirent : "C'est le
temple consacr Diane, notre grande desse". Alors il dit :
"Restons-y un peu ; je me rjouis beaucoup d'y avoir t conduit".
Et quelques-uns des assistants disaient : "Il est avantageux pournous d'tre ici, puisque Jean lui-mme en convient". Ils
s'arrtrent donc, et Jean pria et dit : "Seigneur Jsus, que ce
temple s'croule et tombe entirement, et que personne ne prisse
ou ne soit bless dans sa chute".
Et aussitt le temple s'croula, et personne n'eut le moindre mal.
Alors Jean se retourna vers le dmon qui habitait en ce lieu, et lui
dit : "Pendant combien de temps, esprit impur, es-tu rest dans cetemple ?" Et le dmon rpondit : "J'y ai fait mon domicile
pendant deux cent quarante ans". Et Jean lui dit : "N'est-ce pas toi
qui as excit contre nous des soldats et qui as fait soulever le
peuple ?" Et le dmon en convient. Alors Jean lui dit : "Je te
commande au nom de Jsus-Christ le Nazaren de ne plus habiter
dans ce temple". Et aussitt le dmon sortit de la ville d'Ephse.
Et tous les habitants furent frapps de surprise, et ils se disaiententre eux : "Nous ne savons par quel artifice cet homme a fait ces
choses, mais il faut que nous le conduisions au juge de la ville, et
qu'il soit puni selon la loi". Et un d'eux, nomm Marnon, de race
juive, dit : "Je sais qu'il est un magicien ainsi que son compagnon,
et qu'ils ont commis beaucoup de mfaits ; il convient donc qu'ils
prissent comme des malfaiteurs". Et Marnon exhortait les
assistants, non nous faire juger, mais nous mettre
immdiatement mort, avant que nous eussions t mens devant
le juge ; la foule s'y refusa cependant et nous amena devant le
juge, qui dit : "De quel crime sont accuss les hommes que vous
m'amenez ?" Et les assistants rpondirent : "Ce sont des
magiciens et des malfaiteurs".
Le juge dit alors : "Qu'est-ce qu'ils ont effectu par leur art
magique ?" Et Marnon dit qu'ils avaient par leurs sortilges
renvers le temple de Diane, et qu'un soldat qui tait venu deJrusalem, les accusait et les connaissait comme tant des
magiciens et qu'il avait leurs aveux cet gard. Et le juge
rpondit : "Que ce soldat vienne et qu'il nous fasse connatre la
vrit". Et il nous fit charger de chanes et renfermer dans la
prison. Les soldats parcoururent toute la ville pour retrouver celui
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qui leur avait parl, mais aprs trois jours, n'ayant pu le dcouvrir,
ils revinrent vers le juge, disant : "Nous ne pouvons rencontrer cet
homme qui a une connaissance certaine de leurs malfices". Le
juge dit : "Nous ne pouvons punir des trangers contre lesquels il
ne se prsente ni accusateurs ni documents, et nous ne saurionsles retenir en prison". Il ordonna donc que l'on nous tirt du
cachot o nous tions, et nous fit des menaces, nous ordonnant de
sortir de la ville. Et les habitants nous poursuivirent, et nous nous
retirmes sur le rivage de la mer, l'endroit o Jean avait t jet
par la tempte, et nous y restmes trois jours, et il nous fut ensuite
permis de rentrer Ephse.
CHAPITRE VIII
Sur ces entrefaites, Domitien suscita sa seconde perscution, et
tandis que Jean tait Ephse, l'empereur adressa au proconsul de
cette ville une lettre, disant : "Nous avons appris qu'il y avait chez
vous un nomm Jean, fils de Zbde, qui passe pour chrtien et
pour le disciple de ce Nazaren que les Juifs ont crucifi causede ses crimes ; qu'il renonce son erreur et qu'il vive, ou qu'il
prisse s'il y persiste". Le proconsul envoya des soldats pour faire
arrter Jean, et, suivant l'arrt de l'empereur, il l'avertit de renier
Jsus-Christ et, de cesser de prcher l'Evangile. Mais Jean lui
rpondit : "Loin de moi de jamais renier le nom si doux de mon
Seigneur, nom auquel tout genou se flchit et que toute langue
confesse ; il vaut mieux obir Dieu qu'aux hommes cause de
la grande gloire de sa Majest, et de la gloire qu'il a promise
ceux qui l'aiment. Je ne renierai pas Jsus-Christ qui est mon
Matre et qui m'a aim, et je ne cesserai pas de prcher l'Evangile
de son nom, jusqu' ce que le cours du ministre qu'il m'a confi
soit accompli". Lorsque le proconsul entendit les paroles de
l'aptre, son visage changea par l'excs de sa colre, et il dit
Jean : "Comment es-tu parvenu une dmence telle que tu excites
contre toi la colre de l'empereur ?" et il ordonna aussitt qu'onl'enfermt dans la prison, en disant : "Il ne faut pas laisser en
libert ceux qui se rvoltent contre le prince et qui mprisent les
lois".
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CHAPITRE IX
Le proconsul crivit Domitien, au sujet de Jean, une lettre ainsi
conue : "A Domitien Csar, toujours auguste, le proconsuld'Ephse. Que ta majest sacre sache au sujet de Jean, fils de
Zbde, concernant lequel tu nous as crit qu'il est venu en Asie,
et qu'il a prch le Christ crucifi, qu'il affirme tre le vrai Dieu et
le Fils de Dieu ; il dprcie le culte de nos dieux invincibles, et il
renverse les temples vnrables qui ont t rigs par nos
anctres. Comme il se livrait la magie, violant ainsi les dits
impriaux, et comme par ses artifices et ses prdications, il attiraittout le peuple d'Ephse au culte d'un homme mort et crucifi,
nous, enflamms de zle pour l'honneur des dieux immortels,
nous avons ordonn qu'il ft amen devant notre tribunal, pour
qu'il cesst de prcher et qu'il offrt aux dieux des libations qui
leur fussent agrables. Comme il nous a t impossible de l'y
dterminer, nous transmettons ces nouvelles ta majest
impriale, afin qu'elle nous fasse savoir ce qu'elle dtermine danssa sagesse suprme au sujet de ce rebelle, et nous l'excuterons
fidlement".
CHAPITRE X
Domitien disputait alors Rome avec Marcel et avec Lin au sujet
de l'avnement de Jsus-Christ, et comme il vit qu'il ne pouvait
les convaincre, il fut rempli de colre, et ce fut en ce moment
qu'on lui prsenta les lettres du proconsul au sujet de Jean ; il se
mit les lire et, de plus en plus irrit, il ordonna au proconsul de
faire partir Jean d'Ephse et de l'envoyer Rome enchan. Le
proconsul, recevant l'ordre de l'empereur, fit enchaner Jean et le
conduisit avec lui Rome sous une escorte de soldats. Quand
Domitien apprit son arrive, cet empereur impie ne voulut pas
voir le visage de l'aptre, et il commanda au proconsul de faireconduire Jean devant la porte Latine et de le faire jeter tout vivant
dans une cuve d'huile bouillante, aprs l'avoir fait flageller et lui
avoir fait couper les cheveux, afin de le montrer
ignominieusement au peuple. Le proconsul commanda de
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dpouiller l'aptre et de le fouetter cruellement aprs lui avoir
ras la tte ; et les licteurs firent ce qui leur tait prescrit.
CHAPITRE XI
Le snat romain se runit ensuite avec le proconsul et avec le
peuple devant la porte Latine, et l'ordre fut donn d'apporter un
tonneau rempli d'huile bouillante dans lequel le bienheureux
aptre Jean fut jet la veille des Nones de mai, nu, flagell et
trait avec ignominie, mais protg par la grce divine de Notre-
Seigneur Jsus-Christ, il sortit de cette huile enflamme et
bouillante comme un athlte plein de vigueur, et sans avoirressenti la moindre brlure ; la protection du Seigneur qui
l'animait fit qu'il n'prouva aucun mal, et qu'il se montra plein de
force et de vigueur. Les fidles qui taient prsents pleuraient de
joie, et levaient leur voix vers le ciel, louant la constance
apostolique et le mrite de Jean l'Evangliste. Et les adorateurs de
Jsus-Christ, qui taient devant la porte Latine, construisirent une
glise, la ddiant sous le nom de Jean. Dieu se servit d'un tyrancruel pour arriver ses desseins, et de mme que Jean et Pierre
avaient t compagnons par leurs vertus et par les miracles qu'ils
avaient faits, de mme la volont du Seigneur tait qu'ils
laissassent Rome le souvenir de leur triomphe. La porte
Vaticane tait devenue triomphale et clbre cause de la croix
de Pierre, la porte Latine doit aussi son renom au tonneau de
Jean. Et le proconsul voyant que l'aptre tait sorti de l'huile sans
avoir de mal, et oint comme un intrpide athlte de Jsus-Christ,
fut frapp de stupeur, et il lui aurait rendu la libert s'il n'avait pas
craint le courroux de l'empereur. Domitien dfendit au proconsul
de faire davantage torturer Jean, et lui commanda de le garder
jusqu' ce qu'il et statu son gard.
CHAPITRE XII
Aprs que ces choses se furent passes, le Seigneur apparut
Jean, et lui dit : "Il faut que tu retournes Ephse, et au bout de
trois mois, tu seras envoy en exil Pathmos ; cette ville a
grandement besoin de toi, et aprs que tu y auras beaucoup sem,
tu la convertiras moi". Nous entrmes donc de nouveau
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Ephse, et les idoles qui restaient furent brises, et il n'y avait pas
un temple Ephse d'o la souillure des simulacres des faux
dieux n'et t enleve. L'aptre Jean fit ces miracles Ephse
avant d'tre exil, et il eut beaucoup souffrir de la part des Juifs,
des Grecs et des Romains, que le diable suscitait contre nous. Etles prtres et les magistrats d'Ephse crivirent Domitien une
autre lettre ainsi conue :
CHAPITRE XIII
"Les habitants d'Ephse Domitien, souverain de l'univers. Nous
te prions de nous venir en aide, car des hommes, sortis de laJude, et qu'on nomme Jean et Prochore, sont venus jeter le
trouble dans notre ville, y prchant une doctrine nouvelle, et ils
ont dtruit, par leurs artifices magiques, tous les temples de nos
grands dieux. Nous te faisons savoir ces choses pour que, d'aprs
tes ordres, nous excutions ta volont leur gard".
L'empereur ayant vu ces lettres ordonna que nous fussions exils,
et il crivit en ces termes :
CHAPITRE XIV
"Domitien Csar, aux magistrats et aux habitants de la ville
d'Ephse. Nous voulons que ces sclrats et ces impies magiciens,
nomms Jean et Prochore, soient exils : notre clmence les a
trop longtemps pargns, mais, maintenant qu'ils insultent les
dieux immortels, il n'est pas juste qu'ils restent au milieu de ceux
qui honorent les dieux. Nous ordonnons qu'ils soient relgus
Pathmos, d'abord, parce qu'ils sont les ennemis du culte des
dieux, ensuite, parce qu'ils mprisent nos lois et qu'ils se jouent
de nos dits ; il faut qu'ils apprennent, en prouvant de grandes
souffrances, respecter la grandeur des dieux et ne pas mpriser
notre autorit".Cet ordre de Csar tant parvenu Ephse, les magistrats nous
jetrent dans les chanes, mon matre Jean et moi, et ils nous
frapprent, nous insultant et disant : "Est-ce l le sducteur qui,
par ses malfices, commet tant de crimes ?" Et cent soldats furent
envoys pour nous garder. Non seulement ils garrottrent Jean
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l'aptre et l'vangliste, l'ami de Dieu, mais encore ils le
frapprent, en l'accablant d'injures, et ils nous conduisirent
ensuite au navire.
CHAPITRE XV
Lorsque nous fmes entrs dans le navire, les soldats nous
commandrent de nous asseoir au milieu du btiment, et ils nous
donnrent pour notre nourriture six onces de pain et un petit vase
plein d'eau, avec un peu de vinaigre. Jean ne prenait par jour que
deux onces de pain et la huitime partie de sa portion d'eau, et il
me laissait le reste. Lorsqu'arriva la troisime heure du jour, lessoldats s'assirent pour manger, et ils avaient en abondance des
vivres et de la boisson de bonne qualit. Aprs avoir mang, ils se
mirent jouer. Et, tandis qu'ils dansaient et qu'ils sautaient, un
d'eux, un jeune homme, courant sur le bord du navire, tomba la
mer. Son pre, qui tait aussi sur le navire, se livra un dsespoir
extrme, et il se serait volontiers, lui aussi, prcipit la mer, si
on ne l'avait retenu. Et quelques-uns des soldats et des officiers,venant l'endroit o Jean tait attach, et voyant qu'il ne pleurait
pas, lui dirent : "Nous pleurons tous cause du malheur qui est
survenu, et tu restes sans donner aucun signe de regret ?" L'aptre
leur dit : "Que voulez-vous que je fasse pour vous ?" Et ils
rpondirent : "Aide-nous, si tu le peux" ; car ils avaient entendu
parler des nombreux miracles qu'il avait faits Ephse.
Jean dit l'un d'eux : "Quel Dieu adores-tu ?" et il rpondit :
"Apollon, Junon, Hercule et Bacchus" ; et un autre : "Et toi,
quels sont tes dieux ?" et il rpondit : "Esculape et la grande
Diane des Ephsiens". Il interrogea galement les autres, et
chacun d'eux fit connatre ses erreurs, et Jean leur dit : "Des dieux
aussi nombreux ne peuvent donc ni aider, ni secourir votre
compagnon, et ils sont hors d'tat de vous assister dans vos
embarras et dans vos chagrin ?" Ils lui rpondirent : "C'est parce
que nous sommes immondes devant eux, qu'ils ont permis quenous prouvions ce malheur". Jean les laissa dans l'affliction
jusqu' la troisime heure du jour suivant, et ensuite, mu de
compassion pour celui qui avait pri, et touch de la douleur de
tous les assistants, il dit : "Lve-toi, mon fils Prochore, et donne-
moi la main", car il tait accabl par le poids de ses fers. Je me
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levai et je lui tendis la main, et il monta dans une partie leve du
navire, et il pleura amrement, et il dit la mer : "Au nom du Fils
de Dieu qui a march sur toi pied sec et pour lequel je porte ces
chanes, comme tant son esclave, rends-nous sain et sauf le
jeune homme que tu as englouti".Ds que Jean eut prononc ces mots, il s'leva aussitt un orage,
et les vagues firent un grand bruit, de sorte que ceux qui taient
bord du navire, craignirent d'tre submergs ; et une vague
norme, tombant sur le navire, jeta le jeune homme sain et sauf.
Tous ceux qui virent ce prodige, se prosternrent aux pieds de
Jean, disant : "Vraiment ton Dieu est le Dieu du ciel et de la terre,
et le crateur de toutes les cratures" ; ils dtachrent alors leschanes qui liaient le bienheureux aptre, et nous restmes avec
eux en trs bon accord.
CHAPITRE XVI
Nous arrivmes ensuite auprs d'un chteau devant lequel s'arrta
notre navire, et nous y sjournmes jusqu'au coucher du soleil.Lorsque ceux qui taient descendus terre furent revenus, nous
partmes, et vers la cinquime heure de la nuit, il s'leva une
tempte terrible, et le navire tait en grand danger de se briser, de
sorte que la mort tait devant les yeux de nous tous. Et dix des
hommes, qui taient bord, vinrent vers Jean, disant : "Aptre du
Dieu vivant, toi qui, sauvant notre camarade des prils de la mer,
nous l'as rendu vivant, et l'as restitu son malheureux pre, prie
ton Dieu, afin qu'il apaise cette tempte, pour que nous ne
prissions pas". L'aptre leur dit : "Taisez-vous, et que chacun de
vous se tienne tranquille sa place". Tous gardrent le silence,
mais les vagues s'agitant de plus en plus, ils se mirent crier :
"Aie piti de nous aptre de Jsus-Christ" ; il leur rpondit :
"Taisez-vous ; ce navire ne prira pas, et pas un d'entre vous ne
perdra un cheveu de sa tte". Il se leva ensuite et dit : "O mer,
l'aptre de Jsus-Christ te commande au nom de Jsus-Christ,calme-toi et reste tranquille". Et aussitt la mer devint
parfaitement calme, et tous furent remplis d'tonnement.
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CHAPITRE XVII
Aprs avoir navigu durant trente jours et autant de nuits, nous
arrivmes Epidaure, o habitait Marnon qui avait, plusieursreprises, soulev les Ephsiens contre nous. Et quand il nous vit
assis dans le navire, il dit ceux qui taient avec nous : "Qui sont
ces hommes qui se trouvent avec vous, bord de ce btiment ?"
Ils rpondirent : "Ce sont des chrtiens, et ils nous ont sauvs d'un
grand pril pendant notre navigation". Marnon demanda :
"Comment s'appellent-ils ?" Et nos compagnons rpondirent :
"L'un d'eux se nomme Jean et son disciple s'appelle Prochore".Marnon monta alors sur le navire, et se mit crier : "Que faites-
vous ici, magiciens, has de Dieu et des hommes ?" L'un des
envoys du roi, qui tait avec les soldats chargs de nous garder,
rprimanda Marnon, en disant : "Pourquoi profres-tu de
semblables paroles contre des hommes saints ? Nous les gardons,
et, suivant l'ordre du roi, nous les conduisons l'le de Pathmos".
Lorsqu'il eut parl ainsi, Marnon descendit de la poupe, etdchirant ses vtements, il criait : "Mes frres, qui rsidez avec
moi Epidaure, aidez-moi tous". Et, comme Marnon tait riche et
qu'il avait de grands biens, une foule nombreuse s'empressa
autour de lui, et demanda la cause de ses clameurs. "C'est",
rpondit-il, "parce qu'il est arriv en cette ville des magiciens qui
sont souills de crimes, et qui ont inflig de grands maux aux
habitants d'Ephse. Ils sont venus ici pour nous faire souffrir les
mmes peines. Venez donc avec moi, vous tous qui habitez
Epidaure, mettons le feu au navire, et que ces magiciens
prissent".
Les habitants crurent aux paroles de Marnon, et voulurent brler
le navire qui nous portait. Mais les envoys de l'empereur, voyant
la mauvaise volont qui se manifestait contre nous, dirent :
"Habitants d'Epidaure, prenez garde de rien faire contre ces
hommes ; nous les conduisons en exil Pathmos, selon l'ordre del'empereur Domitien qui a command qu'ils y fussent relgus".
Les habitants d'Epidaure s'arrtrent alors dans leur entreprise, et
on leur montra les lettres scelles du sceau imprial, et ils dirent :
"Pourquoi ne frappez-vous pas ces hommes de vos pes, afin
qu'ils ne vous chappent point par leurs artifices, et qu'ils ne se
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drobent vos mains, ce qui attirerait sur vous la colre de
l'empereur ? Ce sont des hommes fort dangereux, trs habiles
dans la magie, et ils ont fait prir beaucoup de monde par leurs
malfices ; celui qu'on appelle Jean est un fourbe digne de tous
les supplices". Nos gardiens taient tonns de ces paroles, carMarnon les avait gars par ses paroles trompeuses, et il les pria
de manger avec lui. Quand le repas fut fini, ils embrassrent
Marnon, et ils revinrent furieux sur le navire ; oubliant les
bienfaits que mon matre Jean leur avait accords, ils le lirent
avec de lourdes chanes de fer, et ils nous remirent au rgime qui
nous avait d'abord impos.
CHAPITRE XVIII
Nous partmes d'Epidaure et nous arrivmes Myrrha, o nous
fmes retenus sept jours, cause de la maladie d'un des soldats,
qui souffrait beaucoup de la dysenterie et d'un flux de sang, et, le
huitime jour, il s'leva une querelle entre nos gardiens. Les uns
disaient qu'il n'tait pas propos que nous nous arrtassions pluslongtemps, parce qu'il fallait accomplir l'ordre qui avait t
donn, et achever le voyage commenc ; sinon on s'exposerait
tre tax de ngligence et puni. Les autres rpondirent qu'il n'tait
pas juste d'abandonner un camarade dans une situation fcheuse
qui ne lui permettait pas de supporter les fatigues de la mer, et
qu'il fallait attendre quelques jours, pour voir ce qu'il deviendrait.
Jean, voyant que cette discussion se prolongeait sans rsultat, me
dit : "Mon fils Prochore, va dire ce malade, au nom de Jsus-
Christ, qu'il vienne vers moi". Je m'approchai du malade et je lui
rptais ce que Jean m'avait dit, et il se leva aussitt, et il vint
avec moi auprs de Jean. Et Jean lui dit : "Dis tes compagnons
que nous devons partir d'ici et nous remettre en route". Et aussitt
cet homme qui, malade depuis sept jours, n'avait pris aucun
aliment, engagea ses compagnons se remettre immdiatement
en chemin.
CHAPITRE XIX
Nous vnmes ensuite un endroit qui s'appelait Liphos, et une
violente tempte nous y retint six jours. Ce lieu tait dpourvu
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d'eau douce, et nous tions tous tourments par la soif. Et Jean me
dit : "Mon fils Prochore, fais descendre un vase dans la mer au
nom de Jsus-Christ, et retire-le". Je fis ce qu'il me commandait,
et il me dit ensuite : "Prends plusieurs vases et remplis-les de
cette eau de mer". Je le fis, et tous ces vases se trouvrent aussittremplis de l'eau la plus douce, et Jean dit tous ceux qui taient
sur le navire : "Au nom de Jsus-Christ crucifi, buvez" ; et tous
burent, et furent saisis d'tonnement, et ils se disaient les uns aux
autres : "Que ferons-nous cet homme qui opre les merveilles
dont nous sommes tmoins ? Allons et dlivrons-le de ces chanes
et demandons-lui qu'il nous pardonne le mal que nous lui avons
fait, de peur que le feu du ciel ne descende et qu'il ne nousdtruise".
Ils vinrent donc l'aptre, et lui dirent : "Homme de Dieu, ne
t'irrite pas contre tes serviteurs ; nous accomplissons les ordres de
l'empereur, et nous n'osons pas les enfreindre ; mais nous te
dlivrons de tes chanes et nous ferons tout ce que tu nous
demanderas". Et aussitt ils dgagrent mon matre Jean de ses
liens. Et Jean leur dit : "Je compte pour rien les fatigues etl'inquitude de ce monde ; mais mon me prouve une joie
extrme accomplir la volont et les prceptes de Jsus-Christ,
mon Dieu, qui a t crucifi pour notre salut". Les soldats,
entendant ces paroles, tombrent tous le visage contre terre, et
dirent l'aptre : "Seigneur, voici que tout est en ton pouvoir ; va
en libert o tu voudras : nous nous dirigerons vers notre pays".
Jean leur dit : "Avez-vous assez de confiance dans votre
empereur pour croire que vous ne vous exposerez pas sa colre,
si vous me laissez aller ?" Et ils rpondirent : "Non, Seigneur".
Jean leur dit : "Achevez donc ce que votre matre vous a
command ; rendez-vous l'endroit qu'il a dsign, et retournez
ensuite en paix chez vous". Et Jean leur enseigna ensuite, d'aprs
l'Ecriture sainte, ce qui concerne le Fils de Dieu, et ayant cout
sa parole, ils le prirent de leur donner le baptme, et il en baptisa
en ce jour dix qui taient les chefs des autres. Et partant deLiphos, nous arrivmes Pathmos, et entrant dans la ville, les
soldats nous remirent, d'aprs les ordres de l'empereur, ceux qui
devaient nous recevoir. Les chefs qui avaient t baptiss prirent
Jean de leur permettre de rester avec nous dans cette le, mais il
ne le voulut pas et il dit : "Mes enfants, conservez seulement la
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grce que vous avez reue, et le lieu o vous rsiderez
n'importera pas". Ils restrent dix jours, et ayant reu avec joie sa
bndiction, ils retournrent tous, chacun en son pays.
CHAPITRE XX
Il y avait Pathmos un homme fort riche nomm Myron, et dont
la femme s'appelait Flora ; ils avaient trois fils instruits dans la
science de la rhtorique, et l'an d'entre eux tait possd du
dmon. Myron nous ayant reus chez lui, son fils, qui tait livr
l'esprit malin, connaissant la puissance de Jean, s'enfuit dans un
autre pays, de peur que Jean ne chasst hors de lui l'esprit impur.Myron sachant que son fils s'tait enfui, dit sa femme : "Si ces
hommes taient des gens de bien, notre fils ne se serait pas enfui ;
il faut qu'ils soient, comme on le dit, des magiciens et des
enchanteurs ; ils ont jet leurs malfices sur cette maison, et ils
sont cause de la fuite de notre fils. O mon cher enfant, comment
ai-je t assez insens pour recevoir chez moi ces magiciens qui
sont cause que je t'ai perdu ?"Sa femme lui rpondit : "Si la chose est telle que tu le dis,
pourquoi ne les chasses-tu pas de ta maison, de peur qu'ils ne
frappent nos autres fils de pareils malfices et qu'ils ne les forcent
s'loigner de nous et prir ?" Myron rpondit : "Je ne les
chasserai pas, mais je leur infligerai beaucoup de tribulations
jusqu' ce qu'ils fassent revenir ici notre fils ; ils seront ensuite
punis rigoureusement". Myron tait le beau-frre du gouverneur
de l'le de Pathmos, et tout ce qu'il avait dit sa femme fut rvl
Jean par une inspiration divine, et il me dit : "Mon fils
Prochore, sache que notre hte Myron mdite de nous faire
souffrir beaucoup de maux. Car son fils an tait possd du
dmon, et lorsque nous sommes entrs dans la maison, l'esprit
immonde a eu peur que nous ne le chassions ; il s'est enfui
transportant ce jeune homme dans un autre pays, et c'est pourquoi
Myron est irrit contre nous ; mais que ton esprit ne se trouble pasau sujet des machinations de Myron contre nous". Et tandis que
Jean me parlait ainsi, il arriva une lettre du fils de Myron conue
en ces termes :
"A mon pre et ma mre, moi Apollonide, salut. Un magicien
nomm Jean, que vous avez reu dans votre maison, a accompli
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par ses prestiges beaucoup de choses criminelles, et il a envoy
un esprit qui m'a poursuivi jusque dans cette ville, o aprs avoir
souffert beaucoup de prils, j'ai trouv un homme nomm
Cynops, plein de bont et de franchise, qui m'a racont la cause
de mes malheurs. Et il m'a dit : "Mon fils Apollonide, si cemagicien n'est pas tu, tu ne pourras plus sjourner dans ta patrie,
ni revoir tes parents". C'est pourquoi, mon pre, je te supplie
d'avoir piti de ton fils et de faire prir ce magicien nomm Jean,
afin que je puisse bientt jouir de tes embrassements, de ceux de
ma mre et de mes deux frres".
Myron ayant lu cette lettre, nous enferma aussitt, et se rendant
auprs du gouverneur, il la lui montra ; le gouverneur fut d'autantplus irrit contre nous que le nom de Cynops se trouvait dans
cette lettre, et tous ceux qui habitaient Pathmos respectaient ce
Cynops comme un Dieu, cause de ces grands prestiges. Le
gouverneur, mu des paroles de Myron et d'Apollonide, ordonna
de livrer Jean aux btes ; nous fmes donc de la demeure de
Myron, conduits la prison, et aprs y tre rests trois jours, on
nous amena devant le gouverneur.Et il dit Jean : "Notre excellent empereur Domitien, aprs avoir
entendu les accusations portes contre toi, t'avait condamn ; il t'a
ensuite fait grce de la vie, et voulant te donner les moyens de
t'amender il t'a envoy dans cette le, et voici que tu prtends y
commettre des mfaits plus grands que ceux dont tu t'es rendu
coupable Ephse ; car tu as chass le fils de mon beau-pre.
Rponds-moi promptement avant que je ne te chtie, fais que
mon parent revienne et dis quelle religion tu professes, et de quel
pays tu es venu ici".
Jean rpondit : "Je suis Hbreu, le serviteur de Jsus-Christ, Fils
du Dieu vivant qui a t crucifi et enseveli pour les pchs des
hommes et qui est ressuscit le troisime jour d'entre les morts ; il
m'a envoy prcher l'Evangile toutes les nations pour qu'elles
croient en lui et qu'elles aient la vie ternelle". Le gouverneur lui
dit : "Le pieux empereur t'a condamn l'exil pour avoir prchpareilles choses. Apprends, insens, honorer les dieux et
respecter les immortels ; observe les lois de l'empire et ne
reprsente pas comme tant Dieu un homme qui a t condamn
cause des troubles qu'il excitait". Le bienheureux Jean dit : "Je le
vnre toujours comme tant immortel, et je l'annonce ceux qui
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doivent mener une vie pieuse". Le gouverneur rpondit : "Nous
n'avons pas besoin d'entendre toutes les fables que tu dbites. Il
t'a t dfendu de continuer prcher ainsi ; ramne Apollonide
sain et sauf en cette ville, et rends-le sa famille".
Jean rpondit : "Je ne puis cesser de prcher comme je le fais, etd'attendre ainsi la rcompense du salut ternel, qui m'est promise
la fin de mon travail et que m'accordera celui que j'ai aim et en
qui j'ai cru, mon matre Jsus-Christ qui est bni dans tous les
sicles. Quant ton ami Apollonide, je n'ai rien fait contre lui ; si
tu le permets, j'enverrai mon disciple le chercher et il le ramnera
ici, et s'il a se plaindre de nous, il nous accusera en ta prsence".
Le gouverneur ordonna d'en agir ainsi, et il retint en attendantJean li de deux fortes chanes. Et Jean lui dit : "Permets-moi
dcrire Apollonide, et tu m'enverras ensuite ne prison". Le
gouverneur l'ayant permis, Jean adressa cette lettre Apollonide :
"Jean l'aptre de Jsus-Christ, Fils de Dieu, l'esprit malin qui
habite en Apollonide ; je t'ordonne, au nom du Pre et du Fils et
du Saint-Esprit, de sortir de la crature de Dieu et de ne plus
t'introduire en elle, et de ne pas sjourner en cette le, mais de teretirer dans un dsert o nul homme n'habite. Et c'est ce que moi,
Jean, je te commande au nom de la sainte Trinit".
Moi, Prochore, je pris cette lettre et j'allai la ville o habitait
Apollonide, et qui tait une distance de soixante milles. Et tant
entr dans cette ville, je me mis le chercher, et je le retrouvais
au bout de deux jours ; et aussitt que je me fus approch de lui,
l'esprit immonde le quitta. Et aussitt Apollonide reprit ses sens,
et il me dit : "Pourquoi es-tu venu ici, charitable disciple du
meilleur des hommes ?" Et je rpondis : "Je suis venu pour te
ramener auprs de ton pre qui te chrit, et de ta famille". Et
aussitt il ordonna de prparer des chevaux, et nous nous mmes
en route.
Et quand nous fmes arrivs Pathmos, Apollonide me demanda
o tait la demeure de Jean, et je rpondis que le gouverneur le
retenait en prison charg de chanes. Alors, sans vouloir se rendreauprs de sa famille, il alla droit la prison, et le gelier tomba
ses pieds, lorsqu'il le reconnut. Et Apollonide tant entr et ayant
vu Jean, se prosterna devant lui, mais l'aptre le releva et lui dit :
"Mon fils, que Dieu te bnisse". Et Apollonide dlivra aussitt
Jean de ses fers, et il dit au gelier : "Si le gouverneur demande
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qui a dlivr ce prisonnier, dis-lui que c'est moi". Il nous
conduisit ensuite la maison o son pre, sa mre et ses frres
taient livrs la douleur. Et quand ils le virent, ils se levrent
pleins de joie, et ils l'embrassrent en pleurant, et son pre lui dit :
"Que t'est-il donc arriv, mon fils, pour que tu te sois chapp dema maison et que tu nous aies caus tous une affliction aussi
vive". Et Apollonide rpondit : "Notre maison tait pleine de
pchs et de dmons, et quand Jean, l'aptre du Seigneur, y est
entr, nous l'avons mconnu, et nous n'avons pas su qui
l'envoyait, mais j'ai appris qui il tait et de qui il tenait sa
mission".
Myron, entendant ces paroles, eut foi en son fils, et il dit : "Monfils, s'il en est ainsi, allons vers le gouverneur et annonons-lui ce
que tu nous apprends ; c'est lui qui de concert avec moi, a fait
mettre Jean en prison". Apollonide rpondit : "Ne t'inquite pas
de cela, mon pre, j'ai dlivr Jean, et le gouverneur, qui est
notre parent, veut ce que nous voulons". Et Apollonide introduisit
Jean et lui dit : "Cher matre, annonce-nous des paroles utiles qui
nous fassent recevoir la vie ternelle". Et Jean dit : "Je veuxd'abord que tu me racontes pourquoi tu as abandonn ta patrie et
pourquoi tu t'es rfugi en un pays tranger". Et Apollonide dit :
"Il y a plusieurs annes, tandis que je dormais, quelqu'un vint et
me toucha ; je m'veillais aussitt, et je vis celui qui m'avait
rveill ; ses yeux taient grands et brillaient comme des
charbons ardents, et son visage resplendissait comme l'clair ; il
me dit : "Ouvre la bouche", et aussitt il entra dans mon ventre, et
ds ce jour, je connus tout ce qui devait arriver de bien ou de mal
notre maison, et tous venaient moi et me questionnaient sur
leurs affaires ; mais quand tu es entr dans cette maison, il me
dit : "Apollonide, c'est un magicien", et il me rpta toujours :
"S'il n'est pas mis mort, tu ne pourras revenir dans ton pays".
J'interrogea Cynops, et il m'en a dit autant. Et quand le disciple de
Jean est entr dans le lieu o j'habitais, j'ai vu l'esprit qui tait en
moi en sortir ayant une forme pareille celle qu'il avait quand ilest entr en mon corps, et aussitt je me sentis dlivr de
beaucoup de peines et rempli d'une grande joie et d'une
consolation extrme".
Et Jean dit Apollonide : "Mon fils, c'est un signe de la puissance
et de la misricorde de Jsus-Christ, Fils de Dieu, qui a t
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crucifi pour nous et qui est ressuscit. Le dmon qui tait entr
en toi, te chassa de ta maison lorsque nous y sommes entrs, car il
craignait que nous ne le chassions par la puissance de Jsus-
Christ. Maintenant, mon fils, non seulement nous triomphons de
l'esprit impur en invoquant la puissance de Dieu, mais encorenous l'expulsons par une lettre". Et Jean me demanda la lettre
qu'il avait crite au dmon et dont j'avais t porteur, et il la
montra Apollonide. Lorsque celui-ci l'eut lue, il alla avec nous
et avec ses frres, auprs du gouverneur, et il lui raconta tout ce
qui s'tait pass. Le gouverneur, baissant la tte, nous rendit
grces, et depuis il eut un grand attachement pour Jean, mon
matre, et l'ayant quitt, nous revnmes dans la maison de Myron.
CHAPITRE XXI
Jean, rempli de l'Esprit-Saint, commena leur raconter les
grandeurs de Dieu, et les instruisit dans les saintes Ecritures, et ils
le prirent tous de les baptiser au nom du Pre et du Fils et de
l'Esprit-Saint, et Jean baptisa en ce jour tous ceux qui taient dansla maison de Myron. Et la femme du gouverneur, la fille de
Myron, qui s'appelait Chrysippe, voyant que son pre, sa mre et
ses frres croyaient au Fils de Dieu, dit son mari : "Voici que
toute la maison de mon pre croit en ce Dieu crucifi que Jean
prche ; je dsire donc que nous croyions aussi afin que notre
maison soit glorifie comme celle de mon pre, et puisque tu es
en possession du pouvoir, aide-nous contre ceux qui perscutent
Jean". Son mari lui rpondit : "Je ne puis faire ce que tu conseilles
tant que je gouverne la province ; car la secte des Chrtiens est un
objet de haine et de mpris universel, et si l'on voyait Jean et les
autres chrtiens frquenter ma maison et celle de ton pre, on
nous souponnerait d'tre chrtiens, et il en rsulterait de vives
attaques contre nos maisons et je serai priv de ma charge.
Lorsque j'exerais la magistrature en Grce, je me conformais,
publiquement, au culte des gentils, mais en secret, je favorisaisceux qui croyaient en Jsus-Christ. Lorsque j'aurai accompli le
temps fix pour tre gouverneur, il sera plus propos que je me
dclare Chrtien. Toi, prends notre fils et entre dans la maison de
ton pre, et coute avec zle la parole de Jean, et que ton fils soit
baptis avec toi. Ne mprise aucune des paroles de Jean et ne
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m'en fais part que lorsque j'aurai embrass la foi. Car si les lois
des Grecs condamnent ceux qui rvlent les mystres de leurs
dieux, les Chrtiens doivent tre encore bien plus svres cet
gard".
Et Chrysippe, quittant son mari, prit son fils et vint chez son preMyron ; et tant entre, elle salua ses parents ainsi que l'aptre
Jean. Et il lui demanda : "Pourquoi es-tu venue ici, ma fille ?" Et
elle rpondit : "C'est, bon matre, pour que ma maison soit
glorifie comme celle de mon pre". Et Jean lui dit : "Que Dieu
dirige ton cur, celui de ton mari et celui de ton enfants, et qu'il
conserve tout ce qui est en ta maison". Et Chrysippe, tombant aux
pieds de l'aptre, dit : "Matre, donne-moi, ainsi qu' mon fils, lesigne de Jsus-Christ". Jean lui rpondit : "Allons d'abord parler
ton mari pour que tu sois purifie avec son consentement".
Chrysippe lui raconta ce que son mari avait dit, et Jean fut plein
de joie en apprenant le consentement du gouverneur ; il instruisit
Chrysippe et son fils, il lui recommanda d'observer tous les
prceptes de la foi et il les baptisa au nom du Pre, et du Fils, et
du Saint-Esprit.Myron, voyant que sa fille et son petit-fils croyaient en Jsus-
Christ, fut rempli d'allgresse, et il apporta une grande somme
d'argent sa fille et il lui dit : "Voil de quoi pourvoir nos
besoins ; n'abandonne pas, je t'en prie, ma maison, et ne retourne
pas auprs de ton mari de peur qu'il ne s'lve entre vous quelque
querelle au sujet de Jsus-Christ". Et Chrysippe lui rpondit : "Si
tu veux, mon pre, que je reste avec toi, que cet argent demeure ta
proprit ; j'irai avec mon fils chez moi o nous avons ramass
beaucoup d'or et d'argent, et, y prenant ce qui nous est ncessaire,
nous reviendrons auprs de toi et nous ne ferons qu'un".
Jean, entendant ces paroles, dit Myron : "Ce que tu proposes
ta fille n'est pas permis ; Jsus-Christ ne m'a point envoy pour
que je spare la femme de son mari, ni le mari de sa femme ; que
ta fille retourne en paix dans sa maison, surtout puisqu'elle croit
en Jsus-Christ du consentement de son mari. J'ai confiance dansle Seigneur qui m'a envoy prcher son Evangile ; le mari de
Chrysippe sera du nombre des Chrtiens ; quant l'argent dont
vous parlez, distribuez-le aux pauvres au nom du Seigneur, car il
est dit dans l'Ecriture : "Celui qui donne aux pauvres donne
Dieu". Jean renvoya ainsi Chrysippe avec son enfant auprs de
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son mari, et nous demeurmes chez Myron. Le lendemain, Myron
apporta son trsor aux pieds de l'aptre et lui dit : "Prends cet
argent et distribue-le aux pauvres". Jean lui dit : "J'entends avec
plaisir ta proposition, parce que je sais qu'elle provient de l'amour
de Dieu. Distribue de tes mains ce que tu possdes ceux qui enont besoin". Myron, fidle au prcepte de l'aptre, distribua aux
pauvres ce qu'il possdait, et Dieu le bnissait, et chacun se
rjouissait de ce qu'il tait assist selon ses besoins.
CHAPITRE XXII
Il y avait dans la ville un homme riche qui se nommait Basile, etsa femme s'appelait Charis, et elle tait strile. Basile vint trouver
Rhodon, neveu de Myron, et lui dit : "Comment se fait-il que ton
oncle Myron soit ainsi sduit par cet tranger et qu'il ne vienne
plus avec vous ?" Rhodon rpondit : "Nous reconnaissons sa
doctrine comme bonne, et nous l'coutons volontiers". Basile dit :
"Puisque cet homme a tant de pouvoir, qu'il dise que ma femme
ait un fils". Rhodon dit : "Il a une grande puissance au nom deson Dieu, et il peut faire ce que tu dsires". Basile se hta alors
d'aller chez Myron, afin de voir Jean, et il demanda si Jean y
demeurait, et il dit l'esclave qu'il dsirait le voir. L'esclave
l'annona Myron qui dit Jean : "Basile est la porte et
voudrait te parler" ; Jean se leva aussitt et alla au-devant de
Basile qui s'humilia devant lui, et Jean lui dit : "Que Dieu exauce
toutes les demandes de ton cur. Bienheureux l'homme qui ne
tente pas le Seigneur ; il a puni svrement les Isralites qui le
tentaient ; crois fermement en lui et il visitera ton pouse strile,
et il coutera tes prires". Et Basile, voyant que Jean devinait les
penses qui taient en son esprit, fut saisi d'admiration. Et Jean lui
dit derechef : "Mon fils, crois au Seigneur Jsus, Fils de Dieu, et
il te donnera, cause de ta confiance en lui, tout ce que tu
souhaiteras". Basile rpondit : "Je crois en ce que tu as dit, et je te
prie de prier le Seigneur pour que ma femme ait un fils". Jean luirpondit : "Je te le rpte, crois et tu reconnatras la gloire de
Dieu".
Et Basile revint chez lui plein de joie, et il annona sa femme ce
que Jean lui avait dit, et ils furent tous deux se jeter ses pieds. Et
Jean dit la femme de Basile : "Charis, que la grce de Dieu
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7/30/2019 Actes de St Jean par Prochore
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claire ton cur et celui de ton mari, et qu'il t'accorde une
postrit dsirable". Et, aprs leur avoir prch l'Ecriture, il
implora sur eux la grce de Dieu, et, sur leur demande, il les
baptisa au nom du Pre, et du Fils, et du Saint-Esprit. Et Basile
demanda Jean d'entrer chez lui et d'y faire son sjour, maisMyron ne permit pas que nous quittassions sa maison ; et la
femme de Basile mit au monde un fils qui fut appel Jean d'aprs
le nom de son matre, et il y eut une grande joie dans toute la
famille. Avant la naissance de cet enfant, Basile et Charis
offrirent Jean une grosse somme d'argent pour qu'il la distribut
aux pauvres. Mais Jean dit Basile : "Va dans ta maison, mon
fils, vends ce que tu possdes, et tu auras un trsor dans le ciel".
CHAPITRE XXIII
Le mari de Chrysippe, la fille de Myron, ayant pass deux ans
dans l'emploi de gouverneur, fut dpos de ses fonctions, et un
autre fut nomm sa place. En allant chez sont beau-pre, il dit
Jean : "Le souci des choses de ce monde afflige mon me et m'apriv de beaucoup d'or et d'argent et de grands biens ; je te prie de
me baptiser et de me purifier de mes fautes". Jean le consola et
l'exhorta ; il l'instruisit dans la doctrine sainte et il avertit de
croire de tout son cur Jsus-Christ crucifi, Sauveur de tous, et
il le baptisa au nom du Pre, et du Fils, et du Saint-Esprit.
CHAPITRE XXIV
Il y avait dans la mme ville un homme nomm Crsus qui tait
juge, et sa femme se nommait Sline, et il avait un fils qui tait
tourment par un esprit impur. Et apprenant les merveilles que
Jean oprait au nom de Jsus, il prit son fils et vint chez Myron.
Jean, le voyant, lui dit : "Crsus, tes pchs